TRIBUNE. « Pour la mémoire de Luc Oursel, notre mari et père : réponse au film “La Syndicaliste” »

Dans une tribune destinée au grand public et que publie le JDD, la veuve et les enfants de l’ancien président d’Areva dénoncent la façon dont l’auteure du livre et le metteur en scène du film « La syndicaliste » décrivent Luc Oursel, décédé en 2014, interprété par Yvan Attal à l’écran.

Sylvie, Damien, Valentine, Benjamin et Martin Oursel
Luc Oursel, en mai 2014.
Luc Oursel, en mai 2014. SIPA / © WITT/SIPA

Leur lettre ouverte aux auteurs et acteurs de « La syndicaliste » : « Depuis une semaine, sur les plateaux télévisés et les ondes radio, Caroline Michel-Aguirre et Jean-Paul Salomé, entre autres, font la promotion de leur livre et film respectifs, qui racontent l’histoire de Maureen Kearney, syndicaliste chez Areva, qui s’est déroulée fin 2012. 

Nous avons beaucoup de compassion pour Maureen Kearney et nous regrettons les difficultés du parcours judiciaire tortueux auquel cette dernière a été malheureusement confrontée.

 Nous n’acceptons pas que, pour susciter de l’émotion chez le lecteur ou le spectateur, on bafoue l’honneur et la mémoire de notre père et mari 

La famille de Luc Oursel

Néanmoins, nous n’acceptons pas que, pour susciter de l’émotion chez le lecteur ou le spectateur, on bafoue l’honneur et la mémoire de notre père et mari, Luc Oursel, fidèle serviteur de l’État pendant 30 ans de carrière, homme dont l’intégrité et la rigueur ont toujours été mises en avant par ses collaborateurs, supérieurs et partenaires. Il s’est battu jusqu’au bout pour la filière nucléaire française, les intérêts stratégiques de la France et les employés d’Areva. 


Nous tenons donc à rétablir son honneur sur les quelques scènes clés suivantes, délibérément fictionnalisées à des fins cinématographiques : 

  • Non, Luc Oursel n’a jamais jeté de chaise sur Maureen Kearney lors d’un conseil d’administration : les syndicalistes et les collaborateurs siégeant au conseil d’administration auraient porté plainte ou a minima répandu l’histoire si une telle scène s’était réellement produite. Concrètement, ses douleurs au dos l’empêchaient physiquement de “balancer” les lourdes chaises des salles du siège.
  • Non, Luc Oursel n’a jamais menacé physiquement Maureen Kearney. Notre père et mari n’a jamais été quelqu’un de violent.
  • Non, Luc Oursel n’était pas affaibli et malade au moment des faits. Sa maladie mortelle a été diagnostiquée bien plus tard. 
  • Non, Luc Oursel n’a pas cherché à intervenir dans le processus judiciaire, en rencontrant par exemple le procureur de Versailles, tel un “barbouze” un soir sur le parvis du château de Versailles.
  • Non, cette affaire n’a pas mené à la destruction de dizaines de milliers d’emploi chez Areva, ni à des transferts de technologies stratégiques à la Chine : les contreparties visées par les transferts de technologie n’ont pas été jugées suffisantes par les dirigeants et actionnaires d’Areva et EDF, qui ont donc mis fin aux négociations préliminaires initiées par l’accord entre Areva, EDF et CGNPC que Maureen Kearney dénonce. En 2015, un plan social a eu lieu concernant 7 000 emplois dans le monde, dont 3 à 4 000 en France ; c’était la conséquence de la baisse de chiffre d’affaires d’Areva et d’un surendettement. 

 Le réalisateur et Yvan Attal auraient pu au moins avoir la délicatesse de nous contacter avant de caricaturer maladroitement et faussement à l’écran son personnage 

La famille de Luc Oursel

Le film comporte de nombreux autres partis-pris qui cherchent à accentuer fictivement les enjeux politiques pour les spectateurs. Par exemple, le rendez-vous prévu avec François Hollande, alors président de la République, qui aurait dû avoir lieu le jour de l’agression, est complètement inventé.

Après notre visionnage du film en avant-première, nous avons obtenu de la production de modifier l’annonce initiale du film, passant “d'après une histoire vraie” en : “Ce film est une fiction inspirée de faits réels. Il reflète la vision subjective des auteurs sur cette affaire et ses protagonistes.” Au cours de différentes avant-premières, Jean-Paul Salomé a d’ailleurs admis une large part d’invention et de fiction, nécessaires à l’adaptation cinématographique, mais a toujours communiqué de façon ambiguë sur la réalité des faits exposés dans le film.

Voilà qui était Luc Oursel. Le réalisateur et Yvan Attal, qui interprète notre père et mari, auraient pu au moins avoir la délicatesse de nous contacter avant de caricaturer maladroitement et faussement à l’écran son personnage. »

Sylvie, Damien, Valentine, Benjamin et Martin Oursel



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