ALGÉRIE

 

La conquête de l’Algérie, une « nouvelle croisade »

Bataille d'Ascalon, 18 novembre 1177, tableau de Charles-Philippe Larivière, 1844 - source : Château de Versailles-WikiCommons
 

Dès son déclenchement en 1830, la colonisation de l’Algérie est perçue par une certaine frange de la presse monarchiste comme un retour des «  croisés » sur les terres des « infidèles ». Les figures de Louis IX et Richard Cœur-de-Lion sont, sans surprise, mobilisées.


La conquête de l’Algérie fut une entreprise coloniale d’une violence rare, entraînant, durant sa première phase, entre 1830 et 1848, selon l’historien Jacques Frémeaux, entre 300 000 et 400 000 victimes (sur une population estimée à 3 millions d’habitants), en grande partie civiles. 

Pour atténuer cet aspect, en France, elle est surtout présentée à l’époque comme une entreprise glorieuse et chevaleresque héritière des croisades du Moyen Âge. Ce parallèle plaît aussi aux descendants de l’ancienne aristocratie qui, malgré la Restauration, perdent de l’influence en métropole et se sentent à l’étroit dans un pays en pleine révolution industrielle plus préoccupé, estiment-t-ils, par le profit et les usines que par la quête de la gloire. 

L’expédition d’Alger, vite transformée en guerre de longue haleine, constitue alors pour eux, comme le deviennent au fil du XIXe siècle Jérusalem et Constantinople, un lieu où ils peuvent projeter leurs rêves de devenir les égaux de leurs ancêtres.


Ce désir d’une nouvelle croisade date d’avant même l’expédition d’Alger. Dans la monarchie restaurée qui se plaît à idéaliser le Moyen Âge des Capétiens pour redorer le blason des rois, Joseph-François Michaud, académicien proche de Chateaubriand et partisan des Bourbons, publie entre 1812 et 1822 une monumentale Histoire des Croisades qui sera plusieurs fois rééditée tout au long du XIXe siècle, notamment en 1877 dans une version illustrée par Gustave Doré. Réactionnaire convaincu, il voit dans l’expédition qui se prépare contre Alger en 1830 une nouvelle croisade. Dans La Quotidienne, journal dont il est rédacteur en chef depuis 1817, on peut ainsi lire dès mars 1830, alors que l’armée en est encore à ses ultimes préparatifs, les propos suivants :




Cet article signé J. P. (sans doute Jean-Joseph-François Poujoulat, dont nous reparlerons), considère les croisades non seulement comme une « guerre sainte », mais, reprenant à son compte le discours révolutionnaire, comme un conflit qui apportera la « civilisation » moderne (les « Lumières ») dans un monde qualifié de « barbare ». 





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