Qui est Toussaint Louverture, figure de la lutte anti-esclavage qu’Emmanuel Macron célèbre ce jeudi
Emmanuel Macron se rend ce jeudi 27 avril 2023 au château de Joux dans le Doubs, pour y célébrer le 175e anniversaire de l’abolition de l’esclavage en France. C’est dans ce château que Toussaint Louverture, figure complexe de la lutte contre l’esclavage, fut emprisonné.
La Révolution française offrait décidément des plans de carrière comme on n’en fait plus. Preuve en est : le parcours de Toussaint Louverture, qu’Emmanuel Macron célèbre ce jeudi 27 avril 2023, au Château de Joux (Doubs), où le Franco-Haïtien fut emprisonné, au terme d’une vie qu’il aura démarré au plus bas et fini au plus haut, ou presque.
Un esclave devenu propriétaire d’exploitation sucrière
Celui qui fut d’abord appelé Toussaint de Bréda (du nom de son lieu de naissance) est en effet né esclave, au début des années 1740. Comme le rappelle le média spécialisé Hérodote , il commence par travailler dans une plantation de cannes à sucre de Saint-Domingue, l’actuel Haïti, alors dans le giron de la couronne de France.
Quelques décennies plus tard, le jeune Toussaint devient cocher. Puis, en 1776, il est affranchi. À près de 30 ans, le voilà donc un homme libre.
Après s’être marié à une femme noire elle aussi affranchie, il devient à son tour propriétaire d’une plantation sucrière. Avec un paradoxe, pour qui connaît son destin futur : à l’époque Toussaint est le propriétaire « de quelques esclaves », explique la Fondation pour la mémoire de l’esclavage. Pour le reste, François Toussaint est un modèle d’émancipation. « En 1789, il sait lire, écrire » et « il s’est enrichi », complète la Fondation.
Un soutien de l’Espagne…
1789, justement. Les termes des débats politiques qui agitent alors la Métropole parviennent jusqu’à Saint-Domingue, où les esclaves noirs ne tarderont pas à se soulever contre le Royaume de France. Des affranchis les rejoindront rapidement. Toussaint est de ceux-là.
Détentrice de la partie est de l’île sur laquelle se situe Saint-Domingue, la couronne d’Espagne, alors en guerre contre la France, voit dans ce soulèvement un bon moyen de nuire aux intérêts de sa voisine. En 1793, Madrid apporte donc son soutien aux rebelles. Et Toussaint, l’un de leurs leaders, prend du galon.
… puis de la France
Mais, en 1794, quelques mois après avoir proclamé « la liberté générale à Saint-Domingue », la République française, la première du nom, vote un décret abolissant l’esclavage.
La décision de la Convention convainc Toussaint de revenir dans le giron français. Combattant désormais sous la bannière tricolore, ses 4 000 soldats portent alors des coups fatals aux Espagnols, qui finiront par capituler. Les Anglais, qui ont également des vues sur Saint-Domingue, feront bientôt de même.
Entre-temps, comme le rappelle le Musée de l’Armée, Toussaint est devenu général, puis général en chef des armées françaises de Saint-Domingue. C’est aussi à cette époque que l’on commence à l’appeler : « Toussaint Louverture », un surnom original qu’il doit à sa faculté à réaliser des percées dans les lignes ennemies, lors des nombreuses batailles qu’il doit ou a dû mener.
Conflit avec la France de Napoléon
Une fois les Espagnols et les Anglais boutés hors de l’île, Toussaint Louverture, leader désormais incontesté de Saint-Domingue, s’en nomme lui-même gouverneur à vie, avec droit de regard sur l’identité de son successeur.
Il exerce alors son pouvoir « en maître absolu », regrette la Fondation pour la mémoire de l’esclavage. Par ailleurs, il « encourage les planteurs à revenir et oblige ses frères de couleur à travailler dans les plantations ».
Sur le plan extérieur, il passe également des accords avec les États-Unis et, pire que tout, avec le grand rival britannique. Surtout, en 1801, il proclame unilatéralement l’indépendance de Saint-Domingue.
Pour faire revenir le territoire sous l’autorité française, « Bonaparte envoie alors une troupe de vingt-cinq mille hommes », explique le Musée de l’Armée. Les combats qui sont alors engagés aboutissent à la défaite de Toussaint Louverture et des siens.
« Victime du froid »
Toussaint Louverture est ensuite arrêté, puis envoyé en France. À Brest, d’abord, puis au fort de Joux, dans le Doubs, l’une des régions les plus froides de l’Hexagone. « Victime du froid et du dénuement, il ne tarde pas à tomber malade et à mourir », conclut Hérodote. Son souvenir restera lui bien vivant. Et Saint-Domingue finira, quelques mois plus tard, par devenir définitivement indépendante, sous le nom d’Haïti.