Ces 177 Français inconnus, héros du Jour J

Ils furent 175 000 à débarquer le 6 juin 1944 sur les côtes normandes. Dont 177 Français oubliés. Un livre retrace leur histoire.

Le commando Kieffer. Les survivants ont attendu 2004 pour recevoir la Légion d'honneur. Le commando Kieffer. Les survivants ont attendu 2004 pour recevoir la Légion d'honneur.

 
On célèbre avec un faste inégalé le 70ème anniversaire du plus gigantesque débarquement militaire de l'histoire, le 6 juin 1944, sur les côtes de Normandie. Les troupes franchissant la Manche ce jour-là étaient composées pour l'essentiel de soldats américains, canadiens et britanniques, près de 175 000 ayant mis le pied sur le sol français au soir du jour J. Et parmi eux, un nombre infime de soldats français : les 177 marins du 1er bataillon de fusiliers marins commandos (BFMC) aux ordres de Philippe Kieffer, qui débarquèrent sur la plage d'Ouistreham (Calvados).
Dans le livre qu'il publie pour célébrer la mémoire de ces Français exceptionnels, qu'il appelle les "modestes héros", le journaliste Jean-Marc Tanguy revient sur les itinéraires individuels et collectifs qui les conduisirent à la bonne place, au jour de gloire. Rejoindre Londres ne fut jamais une mince affaire, mais, pour les futurs commandos, le plus dur restait à faire : l'entraînement d'une extrême dureté au centre d'Achnacarry, en Écosse, sous la férule d'instructeurs britanniques aguerris. Car, à cette époque, les créateurs de la guerre commando moderne sont bien les soldats de Sa Majesté.

"Rien d'émouvant"

Depuis dix ans, l'auteur suit pas à pas les survivants de cette unité d'élite. Ils ne sont plus que dix, dont Hubert Faure, qui a plus de 100 ans, et René Rossey, le benjamin de 87 ans. La moitié d'entre eux seront présents lors des cérémonies. Dans les témoignages recueillis par Tanguy, on est moins frappé par l'authenticité des exploits accomplis par ces hommes au combat, au prix de lourdes pertes, que par leur manière de les banaliser : "Chacun se débrouillait pour sauver sa vie", explique ainsi Rossey, quand Léon Gautier trouve que ça aurait pu aller plus vite : "J'ai trouvé la journée du 6 juin très longue, pas forcément très dure par rapport à ce qu'on attendait, mais vraiment très longue." Quant au passage du Pegasus Bridge, il ne l'a pas vraiment marqué : "Les balles sifflaient, des fumigènes avaient été tirés pour protéger le passage, mais rien d'émouvant." Effectivement, on ne saurait être plus modeste !

Regret

L'ouvrage est abondamment illustré de photos de l'auteur, pour la période récente, et d'images historiques peu connues tirées pour l'essentiel des archives britanniques. Il fait une large place à un amer regret de Tanguy : si l'histoire de ces hommes n'a pas été oubliée dans le fameux Jour le plus long de Darryl Zanuck, elle n'a pas inspiré le cinéma français, alors qu'elle contient tous les ingrédients nécessaires... Mais que peut-on demander au cinéma quand la République elle-même a tardé à reconnaître ces combattants d'exception. Il a fallu attendre 2004 pour que les derniers survivants qui n'avaient pas encore été décorés reçoivent la Légion d'honneur. En 2008, la marine nationale a recréé le commando Kieffer, spécialisé dans le commandement et l'appui opérationnel et héritier des valeurs des combattants du 6 juin 1944.


Jean-Marc Tanguy, Le Commando Kieffer, les 177 Français du D-Day, Albin Michel / DMPA, 192 pages, 29 euros














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