mardi 8 novembre 2022

SOLEIL VERT vs COP27

 Alors que se tient la COP27 petit rappel du film Soleil Vert



CINÉMA

"Soleil Vert", il y a 50 ans la science-fiction avait prédit 2022

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Il y a 50 ans, le film de science-fiction "Soleil Vert" décrivait une année 2022 caniculaire, sur fond de crise des ressources et avec comme figurants des personnages portant des masques. Comment ce film a-t-il pu à ce point tomber juste ?

Est-ce que la science-fiction peut prédire notre avenir ? On est en droit de se poser la question pour ce qui est de Soleil Vert. Même si à l’époque, beaucoup de critiques ont dit : "Ce film est complètement improbable", d'après l'écologue Frédéric Ducarme, chercheur en philosophie de l'écologie.



















58 min

De la surpopulation au changement climatique

Make room ! Make room !, le roman de Harry Harrisson sort au milieu des années 1960. La peur de l’époque c’est la surpopulation et c’est ce que prophétise ce livre de science-fiction. Quelques années plus tard, quand le réalisateur Richard Fleischer veut l’adapter au cinéma, le baby-boom s’essouffle et la surpopulation fait moins peur.

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"Richard Fleischer cherche à mettre à jour son scénario et il va se tourner vers un écologue professionnel : Frank Bowerman. C’est lui qui propose plein de thèmes qui, à l’époque, sont assez inconnus : le réchauffement climatique, la crise des ressources, l’érosion de la biodiversité et les conséquences politiques qui suivent derrière. Ce qui en fait un film extrêmement visionnaire pour son époque.Frédéric Ducarme

Le détective Thorn ( Charlton Heston ) veut découvrir ce qu'il se cache derrière la fabrication du "soleil vert", 1973.
Le détective Thorn ( Charlton Heston ) veut découvrir ce qu'il se cache derrière la fabrication du "soleil vert", 1973. 
© AFP - MGM

Dans le film, l’homme a exploité toutes les ressources naturelles de la Terre. Plus d’arbres, plus d’animaux, plus de nourriture, plus d’eau… Cette crise alimentaire renforce le pouvoir de multinationales sans scrupule.

"Le film ne se contente pas d’être un film, comme on a eu beaucoup depuis, de catastrophe écologique. C’est aussi un film profondément politique avec l’idée de collusion d’un État corrompu et d’entreprises sans foi ni loi. Alors que beaucoup de films de catastrophes écologiques sont plutôt sur un aspect assez chrétien de la punition divine. Là, c’est pas du tout ça. On est vraiment sur un film d’enquête et de révélation d’un système politique qui a entraîné la crise écologique. Donc on a des choix politiques, qui entraînent des problèmes écologiques, qui eux-mêmes vont renforcer des problèmes politiques et sociologiques. C’est cet emboîtement de l’ensemble, très inattendu de la part d’un grand studio hollywoodien comme ça, qui fait toute l’originalité de ce film." Frédéric Ducarme

L'amnésie environnementale

Dans ce New York fictif de 2022, au 44 millions d’habitants, rares sont ceux qui se souviennent du monde d’avant. La population, nourrie avec des barres colorées, ne se rappelle presque plus de la vraie nourriture. Et le film aborde de façon émouvante et poétique un problème souvent ignoré de la crise écologique : l’amnésie environnementale.

Sol, joué par Edward G. Robinson quelques mois avant sa mort, se souvient avec regret du monde d'avant.
Sol, joué par Edward G. Robinson quelques mois avant sa mort, se souvient avec regret du monde d'avant. 
© AFP - MGM

"L’amnésie environnementale est un des grands concepts de la psychologie de l’environnement et il est très représenté dans le film puisqu'on a deux générations. On a le vieux Sol, qui se rappelle du XXe siècle, des paysages, des écosystèmes, de la bonne nourriture aussi et qui est complètement dévasté par l’évolution du monde. Donc, un exemple de solastalgie. Alors que Thorn qui est plus jeune, lui, a une vision très floue de ces récits-là. D’ailleurs il pense qu’ils sont plus ou moins exagérés, mythifiés, il ne se rend pas compte de tout ce qui a été perdu. Et ça c’est vraiment un des grands enjeux de la psychologie environnementale : c’est que chaque génération naît dans un monde qui est déjà appauvri et ne se rend pas forcément compte de ce à quoi ça ressemblait avant. Des exemples d’amnésies environnementales vous pouvez en trouver très simplement si vous allez sur la Côte d’Azur. Quand on regarde les textes un peu plus anciens, au XVIe siècle, le port de Marseille était tellement infesté de dauphins que c’était une problématique pour les bateaux. Et sous l’Empire romain toutes les plages de la Méditerranée française étaient envahies de phoques." Frédéric Ducarme

Une alerte peu entendue

Soleil Vert dépeint avec virtuosité ce phénomène lent et irréversible de la catastrophe écologique. Diffusé comme un blockbuster, ce chef-d’œuvre de science-fiction a marqué une génération tout en réussissant le tour de force de politiser la question écologique.

"Soylent green" ce sont ces carrés verts qui servent de base à l'alimentation dans le 2022 de Soleil Vert, 1973.
"Soylent green" ce sont ces carrés verts qui servent de base à l'alimentation dans le 2022 de Soleil Vert, 1973. 
© AFP - MGM

Mais à sa sortie en 1973, ce n’est pas tant l’aspect environnemental qui choque mais plutôt ce que découvre le personnage principal, Thorn, joué par Charlton Heston. Pas de spoil mais promis, ça vaut le coup de (re)voir ce film, devenu culte par sa force visionnaire.

 


lundi 7 novembre 2022

STONE L’Aventure Starmania

 

“Starmania” : l’épopée rock qui a rendu le monde stone

En 1978, Michel Berger lors d’un concert avec deux interprètes : France Gall est alors une star et Daniel Balavoine, un inconnu.

En 1978, Michel Berger lors d’un concert avec deux interprètes : France Gall est alors une star et Daniel Balavoine, un inconnu.

Christian Denis/Fastimage / Christian Denis/Fastimage

C’était le rêve de Michel Berger. Il l’a réalisé avec le parolier Luc Plamondon. Tous deux ont écrit le premier opéra rock en français. Une machine à tubes devenue mythique, non sans difficultés.

« Quand je l’ai rencontré, en 1975, il me vouvoyait, je le tutoyais, se souvient aujourd’hui Luc Plamondon, 80 printemps, quand on l’interroge sur la formation de son binôme avec Michel Berger. Il estimait qu’il écrivait des chansonnettes, disait ne plus vouloir travailler pour des chanteuses mais bâtir une œuvre. » Objectif atteint par le biais de cet attelage inattendu : celui d’un auteur-compositeur-interprète français à succès et d’un parolier québécois, tous deux dotés d’une muse médiatique — France Gall pour le premier, Diane Dufresne pour le second. Berger rêve alors d’adapter l’histoire de Patty Hearst, l’héritière d’un empire de la presse kidnappée par un groupe d’extrême gauche armé. Or Plamondon refuse l’idée de raconter une histoire américaine en français.

Pas question non plus de donner dans la comédie musicale : c’est d’un « opéra rock » qu’il s’agit, « non au sens de rock’n’roll mais de musique rythmée », précise Bernard Jeannot-Guérin, enseignant-chercheur à l’université d’Angers, docteur en arts du spectacle et organisateur en 2021 d’un colloque dédié à Starmania. « Pour Michel Berger, ce genre devait explorer les thématiques de la jeunesse et du mal de vivreSes inspirations se situaient en Angleterre ou aux États-Unis, du côté de Tommy des Who, des spectacles Hair ou Jesus Christ Superstar. Mais lui a voulu utiliser tous les genres musicaux : blues, ballade, pop, et même classique — les accords du Monde est stone sont les mêmes que ceux du Canon de Pachelbel. » Marqué par les actions de la bande à Baader ou la guerre des gangs à Soho, comme par la multiplication des chaînes de télé dans les années 1970 et le « quart d’heure de célébrité » de chacun prophétisé par Andy Warhol, Luc Plamondon ancre lui pleinement l’œuvre dans l’actualité de son temps.

« Il ne faut pas oublier que Plamondon a fait le petit séminaire, qu’il a une culture à la fois ultra classique et hors des codes, note notre spécialiste universitaire de Starmania — qui, en tant qu’artiste amateur, a lui-même mis en scène l’œuvre par trois fois. Le personnage du dictateur Zéro Janvier est inspiré du Citizen Kane d’Orson Welles, la ville de Monopolis évoque Metropolis de Fritz Lang, la star déchue Stella Spotlight rappelle l’ancienne vedette hollywoodienne incarnée par Gloria Swanson dans Sunset Boulevard, le film de Billy Wilder. Tandis que le couple Johnny Rockfort-Cristal fait écho à des personnages de Marvel, la super-héroïne Crystal et son amoureux Johnny Storm, alias la Torche humaine. »

Luc Plamondon et Michel Berger, les créateurs de « Starmania », ici en 1990. Berger rêvait d’adapter un fait divers américain. Mais pas question de raconter une histoire américaine en français pour Plamondon.



Pas question non plus de donner dans la comédie musicale : c’est d’un « opéra rock » qu’il s’agit, « non au sens de rock’n’roll mais de musique rythmée »,

Luc Plamondon et Michel Berger, les créateurs de « Starmania », ici en 1990. Berger rêvait d’adapter un fait divers américain. Mais pas question de raconter une histoire américaine en français pour Plamondon. Pas question non plus de donner dans la comédie musicale : c’est d’un « opéra rock » qu’il s’agit, « non au sens de rock’n’roll mais de musique rythmée »,

MATTON YANN/SIPA / MATTON YANN/SIPA

Pendant deux ans, le duo Berger-Plamondon planche sur ce récit choral désespéré et entièrement chanté, dont les héros sont en quête éperdue de lumière, au mépris — pour certains — de toute humanité. Avant de le porter sur scène, il faut sortir un disque pour le faire connaître. Luc Plamondon tient à un casting mi-français, mi-québécois. « Une chose est cependant entendue entre lui et Michel Berger : leurs interprètes fétiches, à savoir Diane Dufresne et France Gall, ne seront pas du nombre », précise François Alquier dans son ouvrage L’Aventure Starmania (éd. Hors Collection). Et ce pour éviter que la célébrité des chanteuses éclipse le propos de l’œuvre. Le rôle de Marie-Jeanne la « serveuse automate » est confié à la jeune Fabienne Thibeault, repérée quelques années plus tôt par Plamondon. D’autres quasi-inconnus sont recrutés, dont Daniel Balavoine pour le rôle du rebelle Johnny Rockfort. Et finalement, pour rendre le projet commercialement plus viable, quelques vedettes vont revenir au casting, dont… Diane Dufresne et France Gall.

Les auteurs s’arrachent parfois les cheveux : ainsi, la chanson Les Uns contre les autres, que Michel Berger avait initialement sauvée de la poubelle de Luc Plamondon, ne trouve pas preneur. « Comme elle aurait pu aller à tous les personnages, on a d’abord pensé la donner à Diane, raconte Plamondon. Mais elle m’a appelé en disant : “Diane Dufresne ne chante pas les slows”. On l’a ensuite proposée à France Gall, qui voulait un air de plus. Sauf qu’elle a refusé cette “chansonnette”. Et puis Fabienne Thibeault s’est proposée… » Les ventes de l’album, sorti en 1978, sont d’abord modestes. Or, pour le producteur Bernard de Bosson, qui finance l’onéreuse opération, elles conditionnent la tenue du spectacle. Le 11 décembre 1978, une grande partie de la troupe est invitée pour une heure d’émission télévisée, avec l’orchestre symphonique d’Antenne 2. Là enfin, la mayonnaise prend.


Mis en scène par l’Américain Tom O’Horgan, Starmania fait l’événement dès son lancement au Palais des congrès à Paris le 10 avril 1979. En coulisses, des tensions naissent entre les équipes française et québécoise, et entre les Américains et le reste du monde. « Je savais que je participais à un spectacle important, livrait Diane Dufresne à Télérama en 2014. Mais l’ambiance était lourde. Les costumes affreux : du burlesque raté. Et puis c’était un peu la bataille des ego. » Le show est un succès, mais tient l’affiche pour trente-trois représentations seulement. Car les agendas des artistes sont surchargés et les décors intransportables. Starmania laisse dans la mémoire collective des chansons aux textes aussi marquants que leurs mélodies. « L’écriture des morceaux concourt à l’intemporalité de l’œuvre, assure le spécialiste Bernard Jeannot-Guérin. Les Uns contre les autres est une succession de pronoms et d’infinitifs auxquels tout le monde peut s’identifier ; la jeunesse dans son ensemble peut endosser le “on” de Quand on arrive en ville ; chacun peut se reconnaître dans le refrain de Besoin d’amour… » Et ainsi continuer, au fil des décennies, de se projeter dans cet opéra rock à la fois « tubesque » et crépusculaire.


À voir
Starmania, du 8 novembre au 29 janvier 2023 à la Seine Musicale, à Boulogne-Billancourt. Puis en tournée à partir du 10 février 2023 (Strasbourg, Lille, Dijon, Limoges, Marseille…)

STARMANIA

 

“Starmania”, le retour 2022 : une renaissance noire et vénéneuse

Laurence Le Saux

Comment redonner une profondeur narrative à une œuvre culte devenue machine à tubes, régulièrement entendus sur Chante France ou Nostalgie ? De cette tâche ardue, le metteur en scène Thomas Jolly, habitué du théâtre public, se sort admirablement. Son Starmania – freiné par le Covid, et qui lui demanda une gestation plus longue que celle d’une éléphante, aime-t-il à rappeler – éblouit littéralement. Peu de faux pas dans ce retour aux sources, donc au spectacle historique de 1979, dont trente-trois représentations seulement avaient été données. En introduction, un discret hommage à son compositeur Michel Berger : un piano blanc, planté sous les projecteurs, rappelle l’éminent mélodiste. Avant de laisser la place à Monopolis, mégalopole glaçante, où les habitants semblent désincarnés. La ville du futur, terriblement actuelle, est une énorme étoile noire – une référence au nom de la bande d’un voyou local – menaçant machin anguleux qui se scinde en deux, parcouru d’escaliers et d’échelles. Un décor exigeant pour les artistes, qui chantent en montant ou descendant les marches ! Lire la suite

► Lire aussi : « “Starmania” : l’épopée rock qui a rendu le monde stone »

ROUTE DU RHUM

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Pour la première fois de son histoire, la Route du Rhum voit donc son départ reporté de trois jours.


Le départ de la Route du rhum reporté de 72 heures

La 12e édition de la Route du rhum, dont le départ était initialement prévu pour dimanche et avait été reporté en raison de la météo, sera finalement lancée « mercredi à 14 h 15 » à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine), ont annoncé dimanche les organisateurs.

« Le départ sera donné (…) sur la ligne initiale prévue à la pointe du Grouin [car] la météo est plus favorable. Cela reste engagé, mais c’est tout à fait acceptable », a expliqué Francis Le Goff, directeur de la course, en conférence de presse.

Lire aussi : Article réservé à nos abonnés Saint-Malo saoulée par une Route du rhum surdimensionnée


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« Très violente dépression »

« Une très violente dépression, accompagnée d’une mer très forte barre la route dès la première nuit. Elle ne laisse aucune échappatoire aux marins pour sortir de la Manche », expliquait Francis Le Goff, directeur de course.

La météo s’annonce plus favorable avec ce nouveau départ de la Route du Rhum, mercredi 9 novembre. « Une houle de quatre mètres est toutefois attendue en sortie de Manche », annonce Francis Le Goff.


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Des visiteurs croisés aujourd’hui auraient souhaité qu’avec ce report, le village soit lui aussi ouvert plus longtemps au public. « On aurait vu le départ depuis le village sur écran géant. C’est vraiment dommage qu’il soit démonté avant ».


C’est désormais officiel, le départ de la 12e édition de la Route du Rhum sera donné le mercredi 9 novembre à 14 h 15. Les 138 skippers couperont la ligne de départ placée devant la Pointe du Grouin, à Cancale, près de Saint-Malo. Comme prévu, ils débuteront leur transatlantique pas une traversée de la baie de Saint-Malo, et devront franchir une porte au Cap Fréhel avant de gagner leur large.

Les conditions de navigation sur la ligne de départ sont annoncées clémentes, 12 à 15 nœuds de secteur ouest, avec un résiduel de houle entre 1,20 m et 1,50 m. Mais surtout, ces conditions se seront nettement améliorées pour les premiers jours de course. La conjonction d’une très forte houle et d’un fort coup de vent, qui avaient conduit la direction de course à reporter le départ, sera de l’histoire ancienne lorsque la flotte franchira la pointe finistérienne et attaquera la traversée du Golfe de Gascogne. En sortie de Manche, la houle est tout de même estimée à 4 mètres.

Procédure de départ identique entre la Pointe du Grouin et le Cap Fréhel

Le départ de la Route du Rhum | OLIVIER BERNARD / OUEST-FRANCE

Concernant la procédure du départ, rien ne change. Les six classes se répartissent de part et d’autre du bateau comité, avec d’un côté les Ultims, Ocean Fifty, Rhum Mono et Rhum Multi. Et de l’autre les monocoques Imoca et Class40. Pas de changement non plus concernant le public. La Pointe du Grouin et le Cap Fréhel resteront accessibles.

Concernant les sorties des bateaux des bassins de Saint-Malo, elles débuteront mardi par les Ocean fifty et par les Imoca. Puis, dans la nuit, à partir de 3 h 30, le reste de la flotte quittera le port, à savoir les Class40, les Rhum Mono et Rhum Multi.

À noter que les Ultims resteront au mouillage entre Dinard et la Tour Solidor. Seul l’Ultim de Romain Pilliard (Use It Again) a regagné le port dimanche soir.

Le village de la Route du Rhum ouvert jusqu’à dimanche 17 h

Le village, dans sa configuration actuelle, restera en place jusqu’à ce dimanche à 17 h. La phase de démontage débutera dans la foulée de cette fermeture, «pour que la vie puisse reprendre son cours à Saint-Malo, précise Joseph Bizard, le directeur d’OC Sport Pen Duick, organisateur de la Route du Rhum. Il restera un dispositif pontons, mais pas un dispositif événementiel».

En somme, il sera toujours possible de venir voir les bateaux lundi et mardi, mais dans un cadre moins festif.

L’annonce du report du départ, dimanche matin, avait été saluée par une grande majorité de skippers.

Route du Rhum. Le départ sera donné mercredi 9 novembre, à 14 h 15



Le départ de la 12e édition de la Route du Rhum – Destination Guadeloupe sera finalement donné le mercredi 9 novembre, à 14 h 15. La direction de course l’a annoncé ce dimanche matin en conférence de presse. Comme prévu, le départ sera donné devant la Pointe du Grouin, à Cancale, près de Saint-Malo. Et les skippers, avant de prendre le large, devront passer une porte devant le Cap Fréhel.



Francis Le Goff, directeur de course de la Route du Rhum.
THOMAS BRÉGARDIS / OUEST-FRANCE




Voile

Route du Rhum 2022 : y a-t-il des écolos sur l’eau ?



Matériaux moins énergivores, réutilisation de pièces d’anciens navires… Le monde de la voile navigue entre recherche de prouesses sportives et volonté de réduire l’impact environnemental.
par Didier Ravon

C’est l’un des dilemmes de l’époque : limiter la course au gigantisme et à la performance pour mieux préserver l’environnement, donc le bilan carbone. Même si le milieu de la course au large est encore loin du compte, la prise de conscience est réelle. On peut notamment citer le calcul de la durée du cycle de vie d’un bateau neuf ou la mise en place de circuits courts, la mutualisation sur les études, les moules et l’outillage d’où sortent ces prototypes… Quelques équipes ont désormais un responsable du développement durable en charge de limiter l’impact environnemental de ces navires. Dans ce petit monde réunissant architectes, ingénieurs, constructeurs, sponsors, on sait très bien que le demi-nœud en vitesse de plus (1,71 km/h) engendre une augmentation des émissions de dioxyde de carbone (CO2). Suffisant pour provoquer une modification en profondeur des habitudes ? A voir…

«Aucune corrélation entre vitesse et réussite du spectacle»

Roland Jourdain, double vainqueur de la Route du rhum en 2006 et 2010, veut croire que oui. Et de citer en exemple le dernier Vendée Globe, remporté en 2021 par Yannick Bestaven. «Ce tour du monde a été celui de tous les superlatifs, avec un suspense incroyable à l’arrivée, des retombées exceptionnelles. La seule chose qui a diminué, c’est la vitesse, à cause d’une météo peu favorable. Mais on a eu la preuve qu’il n’y a aucune corrélation entre vitesse et réussite du spectacle.» Avec Arthur Le Vaillant, naviguant sur un bateau aussi âgé qu’éprouvé, il est l’un de ceux qui clament que les bateaux de course n’ont nul besoin d’aller à des vitesses supersoniques pour passionner les terriens.

Le marin de 58 ans veut profiter de la Route du rhum pour «battre le fer»We Explore, son catamaran de 18 mètres, est fabriqué à 50 % avec des fibres de lin. «Ces dernières sont moins énergivores que la fibre de verre et offrent des propriétés mécaniques proches», explique-t-il. Sur son multicoque, c’est donc un hectare de fibres végétales produites en Normandie qui assurent la rigidité de la structure. Les aménagements sont un composite 100 % biosourcé, recyclable et compostable. Ce bateau participe aussi au reconditionnement et à cette économie dite «circulaire», très en vogue actuellement. Comme Marc Guillemot, lui aussi «vétéran» du Rhum, le navigateur a fait son marché sur des chantiers : une partie des accessoires de pont provient d’anciens trimarans de course. Des voiles qui croupissaient dans des conteneurs ont été retaillées et les pièces de carbone réalisées à partir de tissus périmés issus de l’aéronautique. Keni Piperol, 25 ans, a quant à lui construit son Class40 Captain Alternance dans des matériaux 100 % recyclables.

«Le bilan du modèle actuel est accablant»

Il y a un mois, une tribune était publiée par l’Equipe, à l’initiative de jeunes navigateurs regroupés au sein du collectif Nouvelle Vague. Signée par nombre de marins, elle martelait : «Nous pratiquons un sport magnifique mais il est déraisonnablement polluant et élitiste. Le bilan du modèle actuel est accablant. La Route du rhum libère dans l’atmosphère environ 145 000 tonnes d’équivalent CO2, la logistique et les transports représentant les trois quarts de ces émissions. Ces chiffres, en augmentation d’une course à l’autre, sont en totale contradiction avec les enjeux actuels.» Un propos louable et consensuel, un brin décalé quand le sujet de la réduction de la vitesse est abordé pour épargner les animaux marins victimes de collisions. Il faudrait diviser les performances au moins par cinq pour que les cétacés aient une (petite) chance de s’en sortir vivants…

Certains concurrents pourtant s’agacent, prétendant qu’il ne faut pas scier la branche sur laquelle ils sont assis, et glissant que la voile océanique reste un vecteur de rêve dans un quotidien suffisamment anxiogène. Francis Joyon, qui remet son titre en jeu, tente le compromis : «La planète n’est pas inépuisable, et plus on peut limiter les dégâts, mieux c’est.» Lui privilégie l’énergie solaire et éolienne, ne dépense pas plus de vingt litres de gazole par an, ne change ses voiles que tous les quatre ans. La sobriété appliquée à la course au large.

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