jeudi 16 février 2023

 

Réchauffement climatique : comment les satellites permettent de surveiller l'état de la Terre

Article rédigé par
France Télévisions

 

Réchauffement climatique : comment les satellites permettent de surveiller l'état de la Terre

Article rédigé 

Image satellite prise par le satellite de l'Agence spatiale européenne Sentinel-2, du programme européen Copernicus, montrant de la glace se détachant du glacier Nioghalvfjerdsfjorden, situé au nord-est du Groënland, le 27 août 2020. (EUROPEAN SPACE AGENCY / AFP)
Les différents instruments en orbite au-dessus de nos têtes permettent une couverture globale et exhaustive du recul des glaciers, de la montée des eaux et des émissions de méthane notamment.

L'observation de la Terre et la compréhension du changement climatique forment une "top priorité". C'est ce qu'ont répété des dirigeants de l'Agence spatiale européenne, mercredi 23 novembre, à Paris, à l'occasion de la présentation de son budget record pour les trois années à venir (16,9 milliards d'euros). "L'observation de la Terre est cruciale. On ne peut pas manager ce que l'on n'observe pas", résume le Français Jean-Noël Thépaut, l'un des directeurs de Copernicus, le programme européen d'observation du changement climatique. Des données qui, aussi riches soient-elles, doivent être enrichies et croisées avec des mesures sur le terrain. Pour y voir plus clair, et prendre de la hauteur, franceinfo fait un petit tour d'horizon des observations réalisées par des satellites et sur les apports des données satellitaires.

En observant les glaciers

Des chercheurs du CNRS ont publié, en avril 2021, une "première cartographie complète" de l'évolution des glaciers dans le monde. Les scientifiques se sont principalement appuyés sur environ 500 000 images prises entre 2000 et 2020 par Terra, un satellite de la Nasa, situé à 700 km d'altitude. Ils ont plus particulièrement exploité les données prises par le capteur Aster. Ce dernier pointe à l'aplomb du satellite et à 28 degrés vers l'arrière, précise Etienne Berthier, glaciologue au CNRS, qui a dirigé l'étude. Grâce à cet instrument, les scientifiques réalisent des "couples d'images stéréoscopiques" avec lesquels ils peuvent déterminer l'altitude des glaciers et leur évolution au fil des années. Cela a permis, par exemple, de montrer celle du glacier Upsala, qui se trouve en Patagonie (Argentine). Entre 2003 et 2018, ce dernier a reculé de 4 km, perdu plus de 800 km2 et s'est aminci de plus de 4 m par an.

Images satellites montrant le recul du glacier Upsala, en Patagonie (Argentine), entre 2003 et 2018. (ETIENNE BERTHIER / LEGOS / CNRS)

Si l'image ci-dessus ne montre qu'un seul glacier, le travail porte au total sur 220 000 glaciers autour de la Terre. "Nous couvrons 99% de l'ensemble", remarque Etienne Berthier. Le caractère exhaustif des observations, permis grâce aux satellites, est capital. Jusqu'au milieu du XXe siècle, les données disponibles ne concernaient qu'une cinquantaine de glaciers. Les autres demeuraient inobservés en raison de leur présence dans des zones reculées et difficiles d'accès.

"Dans l'hémisphère sud, avant les satellites, il y avait très peu de mesures. Aux pôles, c'est pareil. De façon générale, ce que les satellites ont apporté, c'est une couverture globale qu'un réseau au sol ne permet pas."

Jean-Noël Thépaut, directeur du programme Copernicus 

à franceinfo

Avant l'arrivée des données satellitaires, pour les scientifiques, l'exercice était d'extrapoler pour essayer d'avoir des estimations globales malgré des "incertitudes très fortes". Grâce aux informations glanées depuis l'espace, les experts ont découvert que les 50 glaciers bien connus "n'étaient pas représentatifs de l'ensemble des glaciers du globe""Nous restons quand même dans la confirmation de tendances vues sur le terrain", tempère Etienne Berthier. En clair, les connaissances se sont consolidées.

"Les scientifiques ont un discours plus clair. Nous avons une confiance élevée dans ce que nous présentons. Maintenant, elle est de 100%."

Etienne Berthier, glaciologue au CNRS 

à franceinfo

Le glaciologue s'inquiète, car le satellite Terra, lancé en 1999, arrive en fin de vie et aucun successeur équivalent n'est prévu. Sans lui, les scientifiques perdront en finesse d'analyse. Ils pourront connaître l'évolution de l'ensemble de toute région mais "nous n'aurons pas l'évolution des glaciers un par un", souligne Etienne Berthier. Pourtant, estime-t-il, il est "crucial d'assurer la pérennité de ce genre d'observations".

En mesurant le niveau de la mer

Le recul des glaciers fait partie des informations désormais populaires sur le réchauffement climatique. La montée des eaux également. Sur ce volet, le satellite de l'ESA Sentinel-6 est en pointe. Lancé en novembre 2020, il orbite à plus de 1 300 km d'altitude et sa mission consiste notamment à faire de l'altimétrie. Concrètement, il est équipé d'un radar qui envoie un signal tous les 7 kilomètres, soit à chaque seconde. Le temps d'aller-retour du signal est mesuré, donnant au final une précision très fine, de l'ordre du millimètre. Une animation du réseau Copernicus a schématisé le fonctionnement de Sentinel-6.

>> Découvrez notre dossier sur la montée des eaux

L'image qui suit est le premier relevé des anomalies du niveau de la mer réalisé par Sentinel-6, en décembre 2020, au large du cap de Bonne espérance (Afrique du Sud). La ligne marquée "S6MF" correspond au relevé de Sentinel-6. Les autres lignes correspondent à ceux effectués par des prédécesseurs : "JA3" pour Jason-3, "S3A" pour Sentinel-3A, "S3B" pour Sentinel Sentinel-3B.

Image du premier relevé des anomalies du niveau de la mer réalisé par le satellite Sentinel-6, au large du cap de Bonne espérance (Afrique du Sud), en décembre 2020. (COPERNICUS / EUMETSAT / ESA)

Le cumul de tels relevés a montré une élévation du niveau de la mer sur les 30 dernières années. Surtout, il a mis en évidence son accélération, souligne Pierre-Yves Le Traon, directeur scientifique du centre océanographique Mercator et directeur de recherche à l'Ifremer.

"Nous étions à 2 mm par an avant en début de période. Ces dernières années, il est à 4 mm par an."

Pierre-Yves Le Traon, océanographe 

à franceinfo

"Le point essentiel est d'avoir des données sur le long terme", insiste-t-il. "La COP27 a bien insisté sur le suivi des océans et le besoin d'observer dans le temps long pour comprendre, prévoir et s'adapter", abonde-t-il. D'où l'importance de l'"intercalibrage" entre un ancien satellite et son successeur. Pour ces passages de flambeau, les scientifiques font voler les satellites ensemble sur de longues périodes – six mois voire un an. L'objectif : bien comprendre les éventuelles différences afin d'harmoniser les données recueillies par les différentes générations de satellites.

Ce qui est valable pour les données relatives aux océans l'est aussi pour d'autres domaines. De façon générale, produire de longues séries de relevés est fondamental pour les questions climatiques, insiste Carole Deniel, responsable du programme composition atmosphérique au Centre national des études spatiales (Cnes).

"Obtenir des données météorologiques constantes, de façon étalonnée, de façon continue, est très important pour suivre les tendances au long terme du climat."

Carole Deniel, chercheuse au Cnes 

à franceinfo

Sentinel-6 fait partie de la flotte européenne Copernicus, qui compte "six types de sentinelles, qui font un scanner ou un IRM de la Terre en permanence", rappelle Jean-Noël Thépaut, l'un des directeurs de ce programme européen. Outre le niveau de la mer, on y trouve notamment des éléments sur la composition atmosphérique, la végétation, les températures ou encore les surfaces continentales.

En traquant les gaz à effet de serre

Le dioxyde de carbone (CO2) est le principal gaz à effet de serre. Il n'est pas le seul membre de cette famille. Le méthane (CH4) en fait également partie. Comme tous les gaz à effet de serre, il contribue de manière significative au dérèglement climatique. Particularité de ce dernier : son pouvoir de réchauffement sur 100 ans est environ 30 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone.

>> On vous explique ce qu'est le méthane, l'autre gaz à effet de serre qui réchauffe le climat

Grâce à des observations satellitaires, des chercheurs ont annoncé en février 2022 avoir identifié environ 1 200 de fuites majeures de méthane dans le monde. Thomas Lauvaux, chercheur en sciences du climat, explique avoir travaillé avec des images prises par le satellite de l'ESA Sentinel-5P, et son capteur Tropomi. L'image qui suit illustre, avec les points jaunes et verts, un panache de méthane issu d’une fuite au Texas (Etats-Unis), prise le 25 septembre 2019.

Image captée par le satellite de l'Agence spatiale européenne Sentinel-5P, montrant un panache de méthane issu d’une fuite au Texas, prise le 25 septembre 2019. (KAYRROS, INC.;ESRI, HERE, GARMIN, FAO, NOAA, USGS, © OPENSTREETMAP CONTRIBUTORS, AND THE GIS USER COMMUNITY)

Le spécialiste explique que ces fuites sont parfois causées par de la malveillance ou de la négligence, mentionnant par exemple le dysfonctionnement pendant plusieurs années d'une torchère, une tuyauterie élevée sur un site d'extraction qui permet de dégager et de brûler les gaz excédentaires d'hydrocarbures.

Un quart des émissions de méthane dues à l'homme trouve son origine dans l'exploitation d'énergies fossiles, comme le charbon, le pétrole et le gaz naturel, dont le CH4 est le principal composant. Sans surprise, les principales fuites de méthane se trouvent dans les principaux pays producteurs d'énergies fossiles, comme le montre cette carte.

Des scientifiques se sont appuyés sur l'imagerie satellite pour identifier des centaines de fuite majeures de méthane dans les principaux pays producteurs d'hydrocarbure. (KAYRROS / ESRI / HERE / GARMIN / FAO / NOAA / USGS)

Thomas Lauvaux confie avoir été "surpris" par les résultats. Il pensait à l'origine que quelques dizaines de fuites allaient être détectées à l'échelle de la planète. C'est finalement beaucoup plus.

"On ne se rendait pas compte que des fuites de méthane arrivaient tout le temps et que personne n'était là pour les voir."

Thomas Lauvaux, spécialiste des gaz à effet de serre 

à franceinfo

Les quelque 1 200 fuites constatées ont, selon les estimations, un impact climatique comparable à celui de la circulation de 20 millions de véhicules pendant un an. "C'est gigantesque", commente le chercheur, soulignant que seules les fuites les plus importantes ont pu être détectées.

Moins médiatisée que d'autres éléments responsables au réchauffement climatique, la traque du méthane est prise très au sérieux. Lors de la COP27, l'ONU a annoncé un nouveau programme visant le méthane baptisé "Methane Alert and Response System" (MARS). Des satellites identifieront les importantes fuites de ce gaz et les gouvernements et entreprises seront prévenus pour pouvoir agir rapidement. Ils pourront aussi bénéficier de conseils sur la manière de résoudre le problème.

Les différents instruments en orbite au-dessus de nos têtes permettent une couverture globale et exhaustive du recul des glaciers, de la montée des eaux et des émissions de méthane notamment.

L'observation de la Terre et la compréhension du changement climatique forment une "top priorité". C'est ce qu'ont répété des dirigeants de l'Agence spatiale européenne, mercredi 23 novembre, à Paris, à l'occasion de la présentation de son budget record pour les trois années à venir (16,9 milliards d'euros). "L'observation de la Terre est cruciale. On ne peut pas manager ce que l'on n'observe pas", résume le Français Jean-Noël Thépaut, l'un des directeurs de Copernicus, le programme européen d'observation du changement climatique. Des données qui, aussi riches soient-elles, doivent être enrichies et croisées avec des mesures sur le terrain. Pour y voir plus clair, et prendre de la hauteur, franceinfo fait un petit tour d'horizon des observations réalisées par des satellites et sur les apports des données satellitaires.

En observant les glaciers

Des chercheurs du CNRS ont publié, en avril 2021, une "première cartographie complète" de l'évolution des glaciers dans le monde. Les scientifiques se sont principalement appuyés sur environ 500 000 images prises entre 2000 et 2020 par Terra, un satellite de la Nasa, situé à 700 km d'altitude. Ils ont plus particulièrement exploité les données prises par le capteur Aster. Ce dernier pointe à l'aplomb du satellite et à 28 degrés vers l'arrière, précise Etienne Berthier, glaciologue au CNRS, qui a dirigé l'étude. Grâce à cet instrument, les scientifiques réalisent des "couples d'images stéréoscopiques" avec lesquels ils peuvent déterminer l'altitude des glaciers et leur évolution au fil des années. Cela a permis, par exemple, de montrer celle du glacier Upsala, qui se trouve en Patagonie (Argentine). Entre 2003 et 2018, ce dernier a reculé de 4 km, perdu plus de 800 km2 et s'est aminci de plus de 4 m par an.

Images satellites montrant le recul du glacier Upsala, en Patagonie (Argentine), entre 2003 et 2018. (ETIENNE BERTHIER / LEGOS / CNRS)

Si l'image ci-dessus ne montre qu'un seul glacier, le travail porte au total sur 220 000 glaciers autour de la Terre. "Nous couvrons 99% de l'ensemble", remarque Etienne Berthier. Le caractère exhaustif des observations, permis grâce aux satellites, est capital. Jusqu'au milieu du XXe siècle, les données disponibles ne concernaient qu'une cinquantaine de glaciers. Les autres demeuraient inobservés en raison de leur présence dans des zones reculées et difficiles d'accès.

"Dans l'hémisphère sud, avant les satellites, il y avait très peu de mesures. Aux pôles, c'est pareil. De façon générale, ce que les satellites ont apporté, c'est une couverture globale qu'un réseau au sol ne permet pas."

Jean-Noël Thépaut, directeur du programme Copernicus 

à franceinfo

Avant l'arrivée des données satellitaires, pour les scientifiques, l'exercice était d'extrapoler pour essayer d'avoir des estimations globales malgré des "incertitudes très fortes". Grâce aux informations glanées depuis l'espace, les experts ont découvert que les 50 glaciers bien connus "n'étaient pas représentatifs de l'ensemble des glaciers du globe""Nous restons quand même dans la confirmation de tendances vues sur le terrain", tempère Etienne Berthier. En clair, les connaissances se sont consolidées.

"Les scientifiques ont un discours plus clair. Nous avons une confiance élevée dans ce que nous présentons. Maintenant, elle est de 100%."

Etienne Berthier, glaciologue au CNRS 

à franceinfo

Le glaciologue s'inquiète, car le satellite Terra, lancé en 1999, arrive en fin de vie et aucun successeur équivalent n'est prévu. Sans lui, les scientifiques perdront en finesse d'analyse. Ils pourront connaître l'évolution de l'ensemble de toute région mais "nous n'aurons pas l'évolution des glaciers un par un", souligne Etienne Berthier. Pourtant, estime-t-il, il est "crucial d'assurer la pérennité de ce genre d'observations".

En mesurant le niveau de la mer

Le recul des glaciers fait partie des informations désormais populaires sur le réchauffement climatique. La montée des eaux également. Sur ce volet, le satellite de l'ESA Sentinel-6 est en pointe. Lancé en novembre 2020, il orbite à plus de 1 300 km d'altitude et sa mission consiste notamment à faire de l'altimétrie. Concrètement, il est équipé d'un radar qui envoie un signal tous les 7 kilomètres, soit à chaque seconde. Le temps d'aller-retour du signal est mesuré, donnant au final une précision très fine, de l'ordre du millimètre. Une animation du réseau Copernicus a schématisé le fonctionnement de Sentinel-6.

>> Découvrez notre dossier sur la montée des eaux

L'image qui suit est le premier relevé des anomalies du niveau de la mer réalisé par Sentinel-6, en décembre 2020, au large du cap de Bonne espérance (Afrique du Sud). La ligne marquée "S6MF" correspond au relevé de Sentinel-6. Les autres lignes correspondent à ceux effectués par des prédécesseurs : "JA3" pour Jason-3, "S3A" pour Sentinel-3A, "S3B" pour Sentinel Sentinel-3B.

Image du premier relevé des anomalies du niveau de la mer réalisé par le satellite Sentinel-6, au large du cap de Bonne espérance (Afrique du Sud), en décembre 2020. (COPERNICUS / EUMETSAT / ESA)

Le cumul de tels relevés a montré une élévation du niveau de la mer sur les 30 dernières années. Surtout, il a mis en évidence son accélération, souligne Pierre-Yves Le Traon, directeur scientifique du centre océanographique Mercator et directeur de recherche à l'Ifremer.

"Nous étions à 2 mm par an avant en début de période. Ces dernières années, il est à 4 mm par an."

Pierre-Yves Le Traon, océanographe 

à franceinfo

"Le point essentiel est d'avoir des données sur le long terme", insiste-t-il. "La COP27 a bien insisté sur le suivi des océans et le besoin d'observer dans le temps long pour comprendre, prévoir et s'adapter", abonde-t-il. D'où l'importance de l'"intercalibrage" entre un ancien satellite et son successeur. Pour ces passages de flambeau, les scientifiques font voler les satellites ensemble sur de longues périodes – six mois voire un an. L'objectif : bien comprendre les éventuelles différences afin d'harmoniser les données recueillies par les différentes générations de satellites.

Ce qui est valable pour les données relatives aux océans l'est aussi pour d'autres domaines. De façon générale, produire de longues séries de relevés est fondamental pour les questions climatiques, insiste Carole Deniel, responsable du programme composition atmosphérique au Centre national des études spatiales (Cnes).

"Obtenir des données météorologiques constantes, de façon étalonnée, de façon continue, est très important pour suivre les tendances au long terme du climat."

Carole Deniel, chercheuse au Cnes 

à franceinfo

Sentinel-6 fait partie de la flotte européenne Copernicus, qui compte "six types de sentinelles, qui font un scanner ou un IRM de la Terre en permanence", rappelle Jean-Noël Thépaut, l'un des directeurs de ce programme européen. Outre le niveau de la mer, on y trouve notamment des éléments sur la composition atmosphérique, la végétation, les températures ou encore les surfaces continentales.

En traquant les gaz à effet de serre

Le dioxyde de carbone (CO2) est le principal gaz à effet de serre. Il n'est pas le seul membre de cette famille. Le méthane (CH4) en fait également partie. Comme tous les gaz à effet de serre, il contribue de manière significative au dérèglement climatique. Particularité de ce dernier : son pouvoir de réchauffement sur 100 ans est environ 30 fois supérieur à celui du dioxyde de carbone.

>> On vous explique ce qu'est le méthane, l'autre gaz à effet de serre qui réchauffe le climat

Grâce à des observations satellitaires, des chercheurs ont annoncé en février 2022 avoir identifié environ 1 200 de fuites majeures de méthane dans le monde. Thomas Lauvaux, chercheur en sciences du climat, explique avoir travaillé avec des images prises par le satellite de l'ESA Sentinel-5P, et son capteur Tropomi. L'image qui suit illustre, avec les points jaunes et verts, un panache de méthane issu d’une fuite au Texas (Etats-Unis), prise le 25 septembre 2019.

Image captée par le satellite de l'Agence spatiale européenne Sentinel-5P, montrant un panache de méthane issu d’une fuite au Texas, prise le 25 septembre 2019. (KAYRROS, INC.;ESRI, HERE, GARMIN, FAO, NOAA, USGS, © OPENSTREETMAP CONTRIBUTORS, AND THE GIS USER COMMUNITY)

Le spécialiste explique que ces fuites sont parfois causées par de la malveillance ou de la négligence, mentionnant par exemple le dysfonctionnement pendant plusieurs années d'une torchère, une tuyauterie élevée sur un site d'extraction qui permet de dégager et de brûler les gaz excédentaires d'hydrocarbures.

Un quart des émissions de méthane dues à l'homme trouve son origine dans l'exploitation d'énergies fossiles, comme le charbon, le pétrole et le gaz naturel, dont le CH4 est le principal composant. Sans surprise, les principales fuites de méthane se trouvent dans les principaux pays producteurs d'énergies fossiles, comme le montre cette carte.

Des scientifiques se sont appuyés sur l'imagerie satellite pour identifier des centaines de fuite majeures de méthane dans les principaux pays producteurs d'hydrocarbure. (KAYRROS / ESRI / HERE / GARMIN / FAO / NOAA / USGS)

Thomas Lauvaux confie avoir été "surpris" par les résultats. Il pensait à l'origine que quelques dizaines de fuites allaient être détectées à l'échelle de la planète. C'est finalement beaucoup plus.

"On ne se rendait pas compte que des fuites de méthane arrivaient tout le temps et que personne n'était là pour les voir."

Thomas Lauvaux, spécialiste des gaz à effet de serre 

à franceinfo

Les quelque 1 200 fuites constatées ont, selon les estimations, un impact climatique comparable à celui de la circulation de 20 millions de véhicules pendant un an. "C'est gigantesque", commente le chercheur, soulignant que seules les fuites les plus importantes ont pu être détectées.

Moins médiatisée que d'autres éléments responsables au réchauffement climatique, la traque du méthane est prise très au sérieux. Lors de la COP27, l'ONU a annoncé un nouveau programme visant le méthane baptisé "Methane Alert and Response System" (MARS). Des satellites identifieront les importantes fuites de ce gaz et les gouvernements et entreprises seront prévenus pour pouvoir agir rapidement. Ils pourront aussi bénéficier de conseils sur la manière de résoudre le problème.

Nombre de scientifiques attendent avec impatience de nouveaux satellites capables de s'intéresser à un problème plus central que celui du méthane. Avec la mission CO2M, qui doit être lancée fin 2025 au plus tôt, une sentinelle (Sentinel-7) sera dédiée à la détection des émissions de CO2 anthropiques, c'est-à-dire les émissions de dioxyde de carbone directement liées aux activités humaines. Des observations fondamentales pour la lutte contre le réchauffement climatique puisqu'il est désormais établi que l'homme est à l'origine de l'actuelle crise climatique.

mercredi 15 février 2023

☄☄☄☄☄🌠

 https://youtu.be/SNx5e7MCdaI

Perros-Guirec. Le météore se désintègre : un flash dans la nuit à Trestraou

Lundi 13 février, la webcam installée à Trestraou a saisi la course et la désintégration spectaculaire du météore 2023 CX1.

Météore Trestraou Perros
Vers 4h du matin, un flash impressionnant sur la baie de Trestraou, à Perros-Guirec, illuminée comme en plein jour. ©Vision-Environnement
Le Trégor

Un point lumineux qui grossit, une luminosité comme à la pleine lune et pour finir un flash impressionnant : lundi 13 février, c’est le spectacle qu’a capté la webcam de Vision-Environnement installée face à la plage de Trestraou, à Perros-Guirec. Mais aussi celle de Trévou-Tréguignec.

Entré dans l’atmosphère à la vitesse de 14 km/seconde vers 4h, cet astéroïde baptisé 2023 CX1 par le Minor Planet Center a ainsi livré son chant du cygne : il s’est désintégré et transformé en étoile filante.

Environ 1 mètre de diamètre

La boule de feu s’est produite à l’heure et à l’emplacement prévus (02:59 UTC), avec des observations principalement du sud du Royaume-Uni et de la France, mais aussi de la Belgique, des Pays-Bas et même de l’Allemagne.

Agence spatiale européenne.

À lire aussi

Spectaculaire, pour un météore qui ne mesurait guère qu’environ 1 mètre de diamètre avant son entrée dans l’atmosphère, tout droit venu de la ceinture principale d’astéroïdes, entre Mars et Jupiter, selon les astronomes.

Un impact qui cette fois avait pu être annoncé grâce aux progrès de la détection.

Météore Trestraou Perros
La pleine lune ? Non, l'astéroïde 2023 CX1 en approche… ©Vision-Environnement

SAINT-VALENTIN EN TABLEAUX

 

Ces onze œuvres d’art n’ont pas attendu la Saint-Valentin pour célébrer l’amour

Sophie Cachon

De Gustave Courbet à Aloïse Corbaz en passant par Marc Chagall, l’amour a bien souvent inspiré les artistes à travers les époques. À l’occasion de la « fête des amoureux », nous avons sélectionné quelques œuvres qui racontent à leur façon l’amour. Sur la route d’Anacapri, de Gerda Wegener, par exemple. Quand ils se marient à Copenhague, en 1904, à la sortie de l’école des Beaux-Arts, Gerda Wegener est portraitiste et son époux, Einar, peintre paysagiste. Mais un jour où l’un de ses modèles lui fait faux bond, Gerda demande à Einar de poser pour elle habillé en femme. C’est la révélation. Dans la peau de son double, qu’il prénomme Lili, celui-ci découvre son identité féminine et décide de changer de sexe, avec l’aide de son épouse. Commence alors l’aventure d’une vie et d’une œuvre intimement confondues où, sous le pinceau de Gerda, Lili s’épanouit en belle jeune femme aux toilettes sophistiquées. Gerda elle-même se met souvent en scène au côté de son époux transgenre. En 1930, après une opération chirurgicale financée par Gerda, Lili devient physiquement et légalement une femme et prend le nom de Lili Ilse. Leur mariage est aussitôt annulé par les autorités. Lire la suite



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De Gustave Courbet à Aloïse Corbaz en passant par Marc Chagall, ces artistes ont été inspirés par l’amour à travers les époques. Notre sélection, à l’occasion de la “fête des amoureux”.

“Les Amants heureux”, de Gustave Courbet

« Les Amants heureux » (1844), de Gustave Courbet.

« Les Amants heureux » (1844), de Gustave Courbet.

Photo Alain Basset / Lyon MBA

En pleine campagne franc-comtoise, ils dansent, dans leur bulle, absents au monde, corps serrés, mains entrelacées, emportés par la musique et le bonheur d’être deux. Gustave Courbet, belle allure, 25 ans, se représente avec sa compagne d’alors, la rousse Virginie Binet, dont il aura un fils naturel quelques années plus tard. L’auteur de L’Origine du monde montre ici son génie à se mettre en scène et à célébrer l’éternel féminin. Une seconde version sur le même thème, presque jumelle, est conservée au musée du Petit-Palais à Paris.

► “Les Amants heureux”, ou “Les Amants dans la campagne, sentiments du jeune âge” (1844), de Gustave Courbet, au musée des Beaux-Arts de Lyon.

“Double portrait au verre de vin”, de Marc Chagall

« Double Portrait au verre de vin » (1917-1918), de Marc Chagall.

« Double Portrait au verre de vin » (1917-1918), de Marc Chagall.

Godong / Alamy Stock Photo

Jamais une œuvre n’aura si intensément célébré le coup de foudre, l’amour fantastique, le ravissement de la fusion parfaite entre deux êtres. Marc Chagall se représente ici juché sur les épaules de sa femme, Bella Rosenfeld, épousée en 1915, dans des couleurs d’une vivacité aussi intense que leurs sentiments. Toute la composition respire la gaieté, l’équilibre magique des êtres, jusqu’au verre de vin brandi par le marié et sa main espiègle sur l’œil de sa compagne. Plénitude, légèreté, avenir solaire, seule la mort de Bella, en 1944 lors de leur exil à New York durant la guerre, séparera ce merveilleux couple en apesanteur.

► Double portrait au verre de vin (1917-1918), de Marc Chagall (1887-1985), au Centre Pompidou.

“Psyché ranimée par le baiser de l’Amour”, d’Antonio Canova

« Psyché ranimée par le baiser de l’Amour », d’Antonio Canova.

« Psyché ranimée par le baiser de l’Amour », d’Antonio Canova.

Alamy Stock Photo

Il était une fois, selon un mythe de Platon, une princesse dénommée Psyché, si belle que la déesse de l’Amour, Aphrodite, l’expédie en enfer pour l’éloigner d’Eros, dieu de l’Amour, qui s’en est épris, bien décidée à ce qu’elle n’en revienne pas. Psyché est chargée de rapporter du pays des morts une boîte qu’elle ne doit pas ouvrir. Évidemment, la belle curieuse l’ouvre et tombe raide, condamnée à l’engourdissement pour la nuit des temps. C’était compter sans Eros, qui, d’un baiser d’amour sincère, la ranime. Le marbre blanc, au grain fin et lisse, l’harmonie du mouvement des bras expriment dans ce chef-d’œuvre exceptionnel de Canova un sentiment d’amour d’une grâce et d’une perfection rares.

► Psyché ranimée par le baiser de l’Amour (1787-1793), d’Antonio Canova (1757-1822), au musée du Louvre.

“Youyou et son épouse Tiy, règne d’Aménophis III”

« Youyou et son épouse Tiy  », règne d’Aménophis III, 1390-1352 av. J.-C..

« Youyou et son épouse Tiy  », règne d’Aménophis III, 1390-1352 av. J.-C..

Alamy Stock Photo

Ils s’aiment depuis trois mille cinq cents ans, date de leur rencontre en Égypte sous le règne d’Aménophis III (1403 à 1353 av. J.-C.), alors que Youyou travaillait comme inspecteur des finances du pharaon, comme indiqué sur le cartouche gravé sur le côté. Sa compagne, la belle Tiy, avec des seins ronds comme des pommes, à moitié cachés par son épaisse perruque, passe tendrement son bras droit dans le dos de son aimé. Il fait de même. Leur stèle funéraire, placée devant leur tombe, a été gravée dans du quartzite, une roche suffisamment solide pour durer l’éternité.

► Youyou et son épouse Tiy, règne d’Aménophis III, 1390-1352 av. J.-C., musée du Louvre.

“La Nuque de Misia”, d’Édouard Vuillard

« La Nuque de Misia » (1897-1899), d’Édouard Vuillard (1868-1940).

« La Nuque de Misia » (1897-1899), d’Édouard Vuillard (1868-1940).

Heritage Images / Getty Images

Écrit-elle une lettre, joue-t-elle du piano ? La « Belle Misia », comme elle était surnommée, est absorbée par son ouvrage. De son pinceau doux, Édouard Vuillard fait quasi sentir, dans cette scène intime, la douceur de la blouse en coton volantée, la mèche de cheveux sortie du chignon, la peau de pêche de l’épaule et le cou, surtout le cou, qui n’attend que le baiser une fois le pinceau posé. Jamais un artiste ne pourrait peindre aussi sensuellement une femme sans l’aimer passionnément. Ce qui est le cas de notre pilier de la bande des nabis, Vuillard, éperdument amoureux de la belle Misia Natanson, femme de son ami Thadée Natanson, créateur de La Revue blanche, qui fut l’égérie des peintres et des écrivains et fit tourner bien des têtes. Édouard Vuillard ne lui déclarera jamais sa flamme.

► La Nuque de Misia (1897-1899), Édouard Vuillard (1868-1940), collection privée.

“Les Époux Arnolfini”, de Jan Van Eyck

“Les Époux Arnolfini”, de Jan Van Eyck, 1434.

“Les Époux Arnolfini”, de Jan Van Eyck, 1434.

The National Gallery, London

Ces célèbres époux Arnolfini, un riche marchand toscan installé à Bruges et sa compagne, ont fait couler beaucoup d’encre. On a longtemps dit que le tableau représentait une cérémonie de mariage, cérémonie très discrète puisqu’il n’y a qu’eux et deux témoins, aperçus dans le miroir de sorcière sur le mur du fond. Est-ce parce que la femme est enceinte, sa main sur son ventre ? Mais l’est-elle vraiment ? La mode à l’époque prisait les robes bouffantes à taille haute. Et les socques abandonnées sur la gauche ? Quelqu’un est-il parti ? Des recherches ont révélé que le sieur Arnolfini n’était pas marié à l’époque. Était-il veuf ? Le tableau serait-il alors un hommage à son amour disparu, peut-être en couches ? Un tableau aussi mystérieux qu’envoûtant.

► Les Époux Arnolfini (1434), Jan Van Eyck (1390-1441), National Gallery, Londres.

“La Fiancée du vent”, d’Oskar Kokoschka

“La Fiancée du vent”, d’Oskar Kokoschka, 1913.

“La Fiancée du vent”, d’Oskar Kokoschka, 1913.

World History Archive / Alamy Stock Photo

Elle dort paisiblement, il ne trouve pas le sommeil, les mains nouées. Le tourbillon qui les emporte semble autant les protéger, tel un cocon, que les broyer dans un maelström terrifiant. À l’image de la relation entre la belle Alma Mahler, veuve du compositeur, pianiste, compositrice elle-même, et le peintre. Leur histoire prendra fin en 1914 après un an de passion orageuse. Terrassé, Kokoschka, enfant terrible de l’expressionnisme, qui commença sa carrière sous les auspices de Klimt, fixe dans cette toile poignante autant la force de la passion que la douleur de la rupture, dans des coups de pinceau torturés et des déclinaisons de bleu, couleur de la tristesse.

► La Fiancée du vent, 1913, Oskar Kokoschka (1886-1980), musée d’Art de Bâle.

“Sur la route d’Anacapri”, de Gerda Wegener

« Sur la route d’Anacapri », de Gerda Wegener.

« Sur la route d’Anacapri », de Gerda Wegener.

Alamy Stock Photo

Quand ils se marient à Copenhague, en 1904, à la sortie de l’école des Beaux-Arts, Gerda Wegener est portraitiste et son époux, Einar, peintre paysagiste. Mais un jour où l’un de ses modèles lui fait faux bond, Gerda demande à Einar de poser pour elle habillé en femme. C’est la révélation. Dans la peau de son double qu’il prénomme Lili, celui-ci découvre son identité féminine et décide de changer de sexe, avec l’aide de son épouse. Commence alors l’aventure d’une vie et d’une œuvre intimement confondues où, sous le pinceau de Gerda, Lili s’épanouit en belle jeune femme aux toilettes sophistiquées. Gerda elle-même se met souvent en scène aux côtés de son époux transgenre. En 1930, après une opération chirurgicale financée par Gerda, Lili devient physiquement et légalement une femme et prend le nom de Lili Ilse. Leur mariage est aussitôt annulé par les autorités.

► Sur la route d’Anacapri, 1922, Gerda Wegener.

“Deux jeunes femmes s’embrassant”, de Louis-Léopold Boilly

« Deux jeunes femmes s'embrassant » (1790-1794), de Louis-Léopold Boilly.

« Deux jeunes femmes s'embrassant » (1790-1794), de Louis-Léopold Boilly.

Alamy Stock Photo

Louis-Léopold Boilly, connu pour ses caricatures savoureuses et ses scènes de la vie parisienne pleines d’esprit, aimait aussi donner à voir par le trou de la serrure, sans voyeurisme ni vulgarité. Il représente ici l’un des premiers baisers lesbiens en peinture. La capeline et le manteau de la visiteuse en vert sont posés à la va-vite sur la desserte, deux verres ont été bus, des fleurs échangées. L’hôte, la robe blanche au décolleté déjà tombant, serre sa bien-aimée dans ses bras avec passion. Ce baiser aurait pu coûter sa tête à son auteur, dénoncé en 1794 par un de ses pairs pour obscénité et menacé, on ne plaisantait pas avec le régime révolutionnaire, de poursuites par la puritaine Société des arts. Boilly s’en sortira en dégainant ses nombreux dessins patriotiques. Les amoureuses, elles, sont retournées sous le manteau, comme les amours lesbiens dans la vraie vie.

► Deux jeunes femmes s’embrassant (1790-1794), Louis-Léopold Boilly (1761-1845), The Ramsbury Manor Foundation

“Les Amoureux”, d’Ernst Ludwig Kirchner

« Les Amoureux » (1921-1923), d’Ernst Ludwig Kirchner.

« Les Amoureux » (1921-1923), d’Ernst Ludwig Kirchner.

agefotostock / Alamy Stock Photo

Quand il se réfugie à Davos, en Suisse, en 1917, le peintre allemand Ernst Ludwig Kirchner, fondateur à Dresde du groupe Die Brücke, est une épave. Alcoolique, drogué, traumatisé par la Première Guerre mondiale, l’artiste, en profonde dépression nerveuse, ne peut plus peindre. L’air de la montagne le fera petit à petit renaître et sa production alpine éclate en couleurs pures extraordinaires. Comme ici, avec sa fidèle complice et amoureuse Nina Hard, danseuse, qui le retrouve l’été dans le petit chalet d’alpage qu’il loue en altitude. Là-haut, les amoureux évoluent comme en Océanie, pays qui inspire Kirchner. Nus ou en pagne, ils dansent dans l’herbe. Couleur pure, composition simple, primitive, bonheur retrouvé, le paradis prend fin quand l’Allemagne envahit l’Autriche en 1938, juste de l’autre côté de la montagne. Kirchner se suicide.

► Les Amoureux (1921-1923), Ernst Ludwig Kirchner (1880-1938), Centre Pompidou.

“Napoléon III à Cherbourg”, d’Aloïse Corbaz

Napoléon III à Cherbourg, entre 1952 et 1954, d’Aloïse Corbaz.

Napoléon III à Cherbourg, entre 1952 et 1954, d’Aloïse Corbaz.

Photo Claude Bornand / Collection de l’Art Brut, Lausanne.

Aloïse Corbaz, dite Aloïse, est l’artiste la plus célèbre de l’art brut et l’amoureuse la plus fervente de l’art tout court. Schizophrène, internée à l’âge de 32 ans, l’artiste a passé sa vie à l’asile de la Rosière, en Suisse, où elle s’est passionnée pour le dessin et l’écriture, les deux souvent mêlés. Ses œuvres sur papier, des feuilles cousues ensemble, forment de grandes compositions faussement enfantines où crayons de couleur, mine de plomb, pétales ou feuilles (ici le géranium) ou papiers d’emballage collés créent une alchimie particulière, attirante. Inlassablement, Aloïse orchestre les amours d’héroïnes à la poitrine avantageuse, auxquelles elle s’identifie, et de chevaliers servants fringants. Son cœur bat pour des vedettes de cinéma ou des têtes couronnées, tel le Kaiser Guillaume II, côtoyé à la cour de Potsdam où elle fut gouvernante. Ici, Napoléon Bonaparte, brandebourgs et épaulettes impeccables, empoigne l’héroïne frémissante par derrière. Sensualité et exaltation canalisées sur papier.

► Napoléon III à Cherbourg (1952-1954), Aloïse Corbaz (1886-1964), collection de l’Art brut, Lausanne.


mardi 14 février 2023

SAINT VALENTIN

 

ENTRETIEN


 « Le coup de foudre, c’est comme un éclair qui nous traverse de la tête aux pieds »



Le coup de foudre fascine. Existe-t-il réellement ? Plusieurs disciplines, y compris la neurobiologie, ont tenté de percer le mystère. Marie-Noëlle Schurmans, sociologue, qui y a consacré un ouvrage d’enquête, nous propose un décryptage. Septième volet de notre série sur les plus belles histoires de coup de foudre.

L’une des caractéristiques fortes du coup de foudre selon Marie-Noëlle Schurmans, c’est l’immédiateté, la violence même, dans l’apparition des sentiments.

Pour écrire Le Coup de foudre : essai de sociologie compréhensive, paru aux éditions PUF, la sociologue Marie-Noëlle Schurmans et sa coautrice Loraine Dominicé ont récolté plus de 250 récits. Le but ? Non pas « dresser des statistiques », explique Marie-Noëlle Schurmans, mais interroger « le sens du coup de foudre amoureux » pour ceux qui l’ont ressenti, et de percer « l’aura de mystère » qui l’entoure.

Pourquoi avoir voulu enquêter sur le coup de foudre ?

Il y a quelque chose de presque magique dans le coup de foudre. On le renvoie le plus souvent à la psychologie, en disant qu’il s’agit d’histoires individuelles. J’ai voulu déterminer ce qu’il y a de social dans cette expérience, en étudiant l’ossature commune des récits. Il y a un double mystère au sujet du coup de foudre. Celui du phénomène en soi : les gens en parlent comme quelque chose de tout à fait incroyable, de rare, de bouleversant. Mais on trouve ce type de récits à différentes périodes de l’histoire et dans différentes cultures. Il y a des histoires emblématiques, comme celles de Tristan et Iseut ou de Roméo et Juliette. L’existence de ce phénomène dans des contextes historiques et géographiques très différents indique que ce n’est pas une histoire strictement privée, qu’il y a quelque chose qui concerne l’organisation sociale.



Peut-on donc affirmer que le coup de foudre existe ?

Ça, c’est la question que tout le monde me pose. Les caractéristiques de l’expression française « coup de foudre » se retrouvent dans beaucoup de langues : colpo di fulmine en italien, flechazo (coup de flèche) en castillan. En camerounais, l’expression signifie « tomber sans glisser » et en lingala, c’est « brusquement pétrifié » ! Pourquoi ces langues, dans leur diversité, ont-elles produit une expression qui désigne cette modalité particulière de débuter une relation amoureuse, en mettant en évidence l’immédiateté, le côté brusque, le danger ? Bien sûr que ça existe ! Les gens qui en parlent n’inventent pas une histoire, ils utilisent un terme disponible en langue pour expliquer une réalité qu’ils ont vécu.

Que nous arrive-t-il lors d’un coup de foudre ?

Les répondants n’ont pas hésité du tout sur ce point. Il y a des caractéristiques très fortes et le premier élément, c’est l’immédiateté. Une femme dit : « C’est devenu très violent, comme un éclair qui te traverse, un courant électrique devenu vraiment fou, comme l’éclair qui te rentre de la tête aux pieds. » « C’est quelque chose qui tombe sur le coin de la gueule, décrit une autre. « Je ne m’y attendais pas, je n’y pensais même pas une seconde avant et tout d’un coup, tu tombes sur quelqu’un pour qui… ». Il y a beaucoup de phrases comme celles-ci qui restent en suspension parce que c’est difficile à exprimer. Il y a beaucoup d’onomatopées aussi. « Cric, bam, schlang, clac ! » J’ai appelé cette phrase « l’irruption de l’événement ». Ensuite, les protagonistes tentent d’expliquer d’où ça vient : « Une force extérieure qui bouleverse les repères et qui marque les corps parfois jusqu’à la douleur. » Ce bouleversement est souvent attribué à une force quasi surnaturelle par des références au sacré : « comme si j’avais été désignée », ou à la magie. Et ils expriment aussi que, par cet événement inattendu, l’autre leur a été révélé en même temps qu’ils se sont sentis révélés à eux-mêmes.

Que se passe-t-il après cet impact ?

Il y a ce que j’ai appelé « le franchissement de la distance ». La plupart du temps, il va y avoir approche. Et là, l’un des thèmes centraux, c’est l’excès. D’habitude, le rapprochement, le premier baiser, le premier contact physique s’installe dans un espace-temps, il y a un peu de prudence. Alors que là, ce qui domine avec l’immédiateté, c’est l’intensité du désir, ça va très vite. Il y a donc le merveilleux du désir, mais il y a aussi la déstabilisation. Beaucoup de personnes parlent d’animalité et d’instinct, un peu comme si la raison ne faisait plus loi : « je suis ma pulsion ».

Et physiologiquement ?

Les neurobiologistes expliquent parfois le coup de foudre par un afflux hormonal (N.D.L.R. : de phényléthylamine, dite la molécule de l’amour) qui saturerait le système limbique (N.D.L.R. : une partie du cerveau dit « cerveau émotionnel »). Mais ce n’est pas une hypothèse explicative. Pourquoi cet afflux ? Par quoi cette explosion de cette substance est-elle occasionnée ? Ce n’est pas une cause mais une conséquence.

Qui rencontre-t-on lors d’un coup de foudre ?

C’est soit mon jumeau, mon reflet dans le miroir, soit mon complément parfait. Ça a l’air opposé mais ça ne l’est pas. Si je rejoins mon jumeau parfait ou si je rejoins mon complément parfait, dans les deux cas, ça crée une complétude totale. Je n’ai plus besoin de personne. Ça, c’est très fort. Donc dans la suite de l’histoire, les amoureux vont s’isoler, ce qui va avoir des conséquences sur leur environnement. Ça peut déstructurer une vie, notamment si les amoureux – ou l’un d’entre eux – sont déjà en couple. Mais plus généralement, ils peuvent rencontrer une forme d’agacement, d’hostilité, voire de rejet dans l’entourage. Ils se sentent les héros de leur propre destin. Mais, si le héros est gratifié d’être héros car il devient un personnage hors du commun, il est en même temps, mis à l’écart.

Un coup de foudre est-il forcément réciproque ?

Certains ne conçoivent pas le coup de foudre s’il n’est pas réciproque. Je m’inscrirais en faux : la majorité des récits font état de la réciprocité mais il y en a pas mal qui racontent que l’autre n’a pas été touché en même temps. La foudre peut passer entre les deux personnes mais elle peut aussi ne frapper qu’une seule tête ! L’intensité du sentiment amoureux pense alors souvent à dire que les yeux de l’autre ne tarderont pas à se déciller…

Est-ce que c’est un amour qui peut durer ?

Selon moi, il y a trois destinées à un coup de foudre et elles ont toutes ont à voir avec la mort, mais ce n’est pas forcément négatif ! La première, c’est celle de Roméo et Juliette, la mort des héros. La deuxième, c’est la mort de la relation : le couple n’arrive pas à réintégrer cette histoire d’exception dans la vie réelle, et il se sépare. Et la troisième, c’est la mort du statut d’exception et donc la mort du coup de foudre lui-même : il s’agit de transformer l’amour fou en amour sage. J’ai rencontré des couples qui, 20 ans après leur coup de foudre, sont toujours mariés, ont des enfants. Et dans ce cas, ils parlent énormément de « travail ». On a dû « travailler à faire en sorte que cette relation perdure ». Il faut faire le sacrifice de l’état de complétude et se projeter dans l’avenir.

Retrouvez les autres volets de notre série :

« J’avais une chance sur un million de le retrouver » : coup de foudre dans le métro

« On se voyait à chaque escale » : coup de foudre dans le cockpit de l’avion

« J’ai fermé l’appli mais je ne l’ai jamais oublié » : coup de foudre sur Tinder

« Je l’ai vu en uniforme, ça m’a fait craquer » : coup de foudre à la gendarmerie

« Le concert avançait, je voulais lui parler » : coup de foudre sur un riff de guitare

« Comme dans un film, je l’ai aimé à la première seconde » : coup de foudre à la caisse

mercredi 8 février 2023

DUSSOPT ET DUSSOPT

 «le dispositif sur les carrières longues a été étendu au point qu’Olivier Dussopt pourrait y être éligible, après ses mois d’intérim dans une usine de plastique, où il travaillait avant ses 21 ans». Comme quoi l'exécutif a raison : cette réforme ne fait pas que des perdants...


«La concertation que vous avez promise apparaît pour ce qu’elle est : un simulacre destiné à faire croire que vous avez d’autres priorités que celles que vous souffle le Medef et un mépris pour les propositions faites par les autres partenaires sociaux, que vous recevez finalement sans les écouter ni les entendre. Par ailleurs, cette volonté de reculer l’âge de la retraite est doublement injuste. D’une part, elle écarte d’emblée la recherche d’autres recettes, notamment la mise à contribution de l’ensemble des revenus et en particulier de ceux issus du capital. […] D’autre part, elle fera porter l’effort sur les générations nées après 1970.» Ces mots ne sont pas ceux d'un dangereux gauchiste irresponsable prêt à faire «s'effondrer» le système par répartition. Ils ont été prononcés par Dussopt. Mais attention, le Dussopt de 2010, alors socialiste et opposé au décalage de l'âge de départ à 62 ans. Il s'adressait à l'époque à Éric Woerth qui portait cette réforme, dans une question au gouvernement qui lui est régulièrement renvoyée comme un boomerang depuis. Hier, c'est le député socialiste Iñaki Echaniz qui a repris mot pour mot cette QAG en interpellant le Dussopt version 2023, celui qui défend le report à 64 ans. Sans préciser l'origine de son propos, évidemment. Ne reconnaissant pas ses mots venus de l'ancien monde mais qui n’ont pas pris une ride, le ministre du Travail a donc répondu en égrenant sans ciller ses arguments actuels tout aussi classiques. Usant de son droit de réponse après avoir religieusement écouté Dussopt, Echaniz a alors révélé la supercherie derrière ce coup de com' de génie : «Monsieur le ministre, je vous remercie la main sur le cœur pour avoir répondu à la question que vous aviez vous-même posée le 4 mai 2010 à Woerth.» Dussopt a beau assumer d'avoir changé d'avis sur la question car le contexte économique ne serait plus le même, la séquence a dû lui faire tout drôle...

mardi 7 février 2023

NAO TRINIDAD

 | ÉVÈNEMENT Marina du Marin | Une réplique du célèbre bateau de Fernand MAGELLAN présent jusqu'à dimanche. 

⏱ Des visites possibles tous les jours de 10h à 18h 

📍 ponton 4





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 " Qu'il est doux de ne rien faire quand tout s'agite autour de nous" .

La ville s 'agite, mon maître stressé par son travail se précipite vers son bureau sans prendre la peine de ranger quoi que ce soit ; et moi, enfoncé dans mon édredon, je ronronne de plaisir à  goûter cette délicieuse et confortable quiétude en tournant le dos à cette vaine agitation. Assuré d'avoir mon repas de croquettes, je peux rêver à des  poursuites endiablées où les souris ont toujours le dessous.




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