2 juin 1953 :Quelle journée malgré la pluie intermittente ! On espérait que le temps serait extrêmement beau comme le 28 juin 1838, pour le couronnement de Victoria, la jeune fille aux cheveux or pâle…
À événement exceptionnel, première page exceptionnelle ! La photo majeure est tirée sur cinq colonnes pour mieux montrer le docteur Fischer, archevêque de Canterbury, placer la lourde couronne de Saint-Edouard (un peu plus de deux kilos tout de même) sur la tête de la reine frêle et menue sous son lourd manteau.
« Le plus grand couronnement du siècle »
Le couronnement a lieu dans une abbaye de Westminster bondée de pairs rouges, de pairesses aux diadèmes étincelants, d’officiers à la baguette d’or, d’une multitude de petits pages, d’un chœur de 400 voix et de toute l’aristocratie britannique en couleur, car le noir est interdit. Elizabeth, la reine mère, veuve de George VI, assiste à la scène les yeux humides.
Les canons tonnent dans tout Londres tandis que paradent les troupes. Vers 15 h 30, la capitale chavire une première fois : un véritable hurlement salue l’apparition du carrosse royal entouré des cuirassiers de la garde, raconte encore le rédacteur au téléphone. Tout un peuple déchaîné acclame sa souveraine à en perdre haleine.Toutes les mains s’agitent, des mouchoirs, des petits drapeaux, les chapeaux sont lancés en l’air.
Une marée humainese déplace maintenant vers le palais de Buckingham où une autre foule guette déjà, depuis des heures, l’arrivée de la souveraine. À 17 h 44 précises, Elizabeth II paraît au balcon, le front ceint de la couronne impériale, en compagnie de son mari Philip, duc d’Edimbourg, et de leurs enfants, la princesse Anne et le prince héritier Charles. Comme une lame de fond balayant tout sur son passage, la clameur vibrante de la foule monta vers la reine, poursuit le journaliste. Dans le ciel passent six escadrilles de la Royal Air Force et une de l’aviation canadienne. Très tard dans la nuit, Londrescontinuera de chanter,de danser, de boire à la santé d’Elizabeth II, au souvenir du plus grand couronnement du siècle.
l'Histoire de la monarchie britannique. Les artistes se produiront devant 22 000 personnes conviées.
L'événement, retransmis dans le monde entier, pourrait être suivi par près d'un milliard de téléspectateurs. Et quoi de mieux pour débuter la soirée que Queen ? «Après avoir joué pour la reine à l'occasion de son jubilé doré, nous sommes vraiment heureux d'être invités à nouveau, ont indiqué les membres du groupe Queen dans un communiqué. Après on s'est demandé: “Après le toit de Buckingham Palace, où peut-on aller ?” Bien… Vous verrez !» En effet, il y a 20 ans, pour le jubilé d'or de Elizabeth II, Brian May avait joué de la guitare sur le toit du palais royal.
Si la prestation d'Elton John est enregistrée, les autres auront lieu en direct. Alicia Keys, Craig David, Hans Zimmer, Andrea Bocelli, Nile Rodgers ou encore Diana Ross feront le show pendant 2h30. La nouvelle star, Sam Ryder, surnommé «le héros du Royaume-Uni à l'Eurovision» après sa seconde place derrière l'Ukraine, sera également de la partie pour interpréter son titre Space Man .
Le concert sera entrecoupé d'interventions de personnalités britanniques: le footballeur David Beckham, la tenniswoman Emma Raducanu ainsi que les comédiens Stephen Fry et Julie Andrews. La mode, le sport, l'environnement et mêmes les 70 dernières années de musique pop seront évoqués.
La soirée se terminera avec Diana Ross, pour «sa première performance en direct au Royaume-Uni depuis 15 ans». «J'ai eu l'honneur de rencontrer la reine plusieurs fois dans ma vie, parfois en présence de ma famille. Sa Majesté continue d'être une incroyable source d'inspiration pour tant de personnes dans le monde. J'ai été absolument ravie de recevoir une invitation pour me produire lors d'un tel moment historique», souligne-t-elle. La diva soul a été l'une des premières Américaines à chanter lors du concert annuel Royal Variety Performance, en 1991.
Au Royaume-Uni, effervescence et «street parties» pour le jubilé de la reine
De jeudi à dimanche, le pays célèbre les soixante-dix ans de règne d’Elizabeth II, un record. Pour l’occasion, les Britanniques se sont rués dans les magasins pour acheter drapeaux et objets dérivés et ont prévu nombre de fêtes de quartier. Ce jubilé pourrait être le dernier de la monarque, âgée de 96 ans.
«On a prévu un DJ, des spectacles, des jeux pour enfants, un concours de gâteaux… Et on attend plus de 1000 personnes !» Dans les voix de Tamara Barklem, Catherine Morris et Nil Batt, qui habitent dans un quartier de l’est de Londres, l’excitation est palpable. Pendant quatre jours de congé exceptionnels, du jeudi 2 au dimanche 5 juin, le Royaume-Uni célèbre les soixante-dix ans de règne de sa reine. Cheffe de l’État britannique depuis le 6 février 1952, Elizabeth II, 96 ans, est la première monarque dans l’histoire du pays à fêter un jubilé de platine. Le précédent record de longévité était détenu par son arrière-arrière-grand-mère, la reine Victoria, restée sur le trône pendant presque soixante-quatre ans (1837-1901).
Pour célébrer ce règne inédit, le pays tout entier s’est mis en branle. Des drapeaux couleurs rouge, bleu, blanc flottent dans les rues, les magasins, les pubs et restaurants, des photos de la reine apparaissent sur les fenêtres, des petites figurines royales tricotées à la main fleurissent sur les boîtes aux lettres… Et vers le palais de Buckingham, il n’était pas rare, ces temps-ci, d’assister à un entraînement de la garde royale peaufinant les détails avant le jour J.
Frénésie de ventes
À Lichfield Road, Catherine Morris, Tamara Barklem et Nil Batt, qui se sont vraiment rencontrés et rapprochés pendant la crise sanitaire, organisent leur première «street party», fête traditionnelle à même les pavés. Prévues par milliers à travers l’île, elles constituent le versant populaire des célébrations officielles qui comprennent défilés, parades militaires et concerts, étalés au fil du week-end. Pour les trois voisins, ce déjeuner de rue est aussi «un hommage à Stan Jones», explique Tamara, comptable de 42 ans. Stan Jones, immense fan des jubilés et résident du 45, Lichfield Road, est décédé récemment à 92 ans. «Il vivait dans la même maison depuis 1936 et a photographié tous les jubilés depuis 1953 [année du couronnement de la reine, ndlr], déroule-t-elle. Une de nos voisines travaille aux archives locales et elle voulait exposer ses photos pendant la street party. On a donc demandé une subvention au Heritage Fund [le Fonds du patrimoine], que nous avons obtenue. C’est à ce moment-là que nous avons eu les moyens d’organiser cette grande fête, qui est aussi un événement patrimonial.»
Qui dit street parties dit forcément déguisements, décorations, avec services à thé, présentoirs pour petites sucreries, assiettes et verres royaux, ainsi que les immanquables drapeaux et banderoles. Selon un récent rapport du Centre for Retail Research, le Royaume-Uni pourrait dépenser 408 millions de livres (478 millions d’euros) pour le jubilé de platine. Cette frénésie a fait bondir les ventes, certaines marchandises étant souvent dévalisées avant même d’atteindre les étagères. «La vitesse à laquelle les gens achètent les produits essentiels du week-end du jubilé est vraiment stupéfiante, c’est du jamais vu», rapportait il y a quelques jours Tamreen Hasan, responsable de la catégorie des articles de fête chez OnBuy (magasin en ligne), dans le Guardian. A en croire le Co-op’s Jubilee Convenience Report, publié le 26 mai, environ 39 millions de Britanniques célébreront le jubilé et 4,1 millions de familles devraient participer à une street party.
Malgré tout, l’engouement «devrait être au rendez-vous», rassurait récemment Sadiq Khan, le maire de Londres. La reine reste très populaire auprès des Britanniques, souvent admiratifs de son engagement et de son parcours. En soixante-dix ans de règne, la monarque a travaillé avec quatorze Premiers ministres britanniques – son premier ayant été Winston Churchill – et rencontré onze dirigeants français.
Ce jubilé prend en outre une dimension particulière car il pourrait être le dernier du règne d’Elizabeth II – ces grandes réjouissances nationales n’ayant lieu que toutes les décennies. Or, au cours de ces derniers mois, la reine est souvent apparue affaiblie, et elle délègue de plus en plus ses apparitions officielles aux autres membres de la famille royale. «Elle est une très bonne reine. Mais je pense qu’elle décline vraiment depuis la mort de son mari [le Prince Philip, disparu en avril 2021], regrette Catherine Morris, 64 ans. C’était un roc et il doit lui manquer. Une partie d’elle doit sûrement penser : j’ai fait ma part à présent et je suis prête à partir maintenant.»
CRITIQUE - Ce documentaire rembobine les soixante-dix ans de règne, que les Anglais célèbrent ce jeudi, de la souveraine. Il s’agit du dernier projet de Roger Michell, regretté réalisateur de Coup de foudre à Notting Hill et de The Duke.
«Elle est si lourde, explique la reine à propos de sa couronne, qu’il m’est impossible de baisser la tête.» La phrase peut s’entendre au figuré. Le tourbillon d’images d’Elizabeth: Regard(s) singulier(s) le rappelle, la souveraine a maintenu le cap de la royauté sans faiblir durant sept décennies. Les Anglais célèbrent cet anniversaire ce jeudi, lors du jubilé de platine. Le regretté Roger Michell, décédé en septembre 2021 à 65 ans, lui rend hommage à sa manière dans ce film nourri de très nombreuses archives.
CRITIQUE - Ce documentaire rembobine les soixante-dix ans de règne, que les Anglais célèbrent ce jeudi, de la souveraine. Il s’agit du dernier projet de Roger Michell, regretté réalisateur de Coup de foudre à Notting Hill et de The Duke.
«Elle est si lourde, explique la reine à propos de sa couronne, qu’il m’est impossible de baisser la tête.» La phrase peut s’entendre au figuré. Le tourbillon d’images d’Elizabeth: Regard(s) singulier(s) le rappelle, la souveraine a maintenu le cap de la royauté sans faiblir durant sept décennies. Les Anglais célèbrent cet anniversaire ce jeudi, lors du jubilé de platine. Le regretté Roger Michell, décédé en septembre 2021 à 65 ans, lui rend hommage à sa manière dans ce film nourri de très nombreuses archives.
Il n’y a pas de voix off, les extraits de reportages ou de documentaires habilement montés suffisent. «Les documents venaient de différents continents, la masterisation de certaines vieilles pellicules s’est révélée assez ardue», se souvient Kevin Loader, producteur historique de Michell. Le réalisateur de Coup de foudre à Notting Hill et plus récemment de la comédie The Duke avait eu l’idée de ce projet qui ne nécessitait pas de tournage durant l’un des confinements de 2020.