Le Trégor -09/13- "le Trégor dans la dernière guerre".
*16/20- Témoin oculaire du débarquement de Saint Michel, l’artiste peintre Henri Blais a réalisé plusieurs toiles sur le sujet qui avait beaucoup frappé les esprits à l’époque.
Les immenses barges de débarquement échouées sur la Lieue de Grève ne passaient pas inaperçues, en cet été 1944. (Photo DR) |
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11 août 1944.
Et les Américainsdébarquèrent à Saint-Michel-en-Grève
Épisode méconnu de la Seconde Guerre mondiale, le débarquement allié du mois d’août 1944, sur la Lieue de Grève, à Saint-Michel-en-Grève, a apporté un soutien logistique essentiel à la Libération de la Bretagne. Retour sur une grande page de notre histoire locale, l’opération Author.
Ils sont arrivés un jour d’août 1944.
Le 11.
Un vendredi.
Certains Trégorrois les avaient déjà repérés, au matin, derrière la pointe de Beg ar Forn, à Trédrez-Locquémeau. Il faut dire qu’ils ne passaient pas inaperçus, ces trois LST (Landing ship tank), avec leurs ballons antiaériens volant au-dessus d’eux. Escortés par le Hothal et le Middlesex, deux destroyers anglais, des dragueurs de mine de la flottille britannique et par la frégate française La Découverte, ces 3 immenses barges de débarquement venaient de traverser la Manche pour s’échouer sur la Lieue de Grève.
Quelques jours plutôt, la Task force A du Général Patton, arrivée de Normandie, avait libéré Saint-Brieuc.
Le 8 août, une colonne de blindés américains délivrait Morlaix. La mission des alliés était simple : foncer sur Brest où des poches allemandes résistaient encore.
Après la bataille de Normandie et l’opération Overlrod, le brigadier général Earnest avait reçu l’ordre de prendre le contrôle de la zone. « Attaquez et prenez Saint-Michel-en-Grève demain matin. Faites attention aux plages, nous voulons les utiliser ».
Après Overlord, les missions Author I et Author II
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La mission Author I était lancée. Une mission quelque peu improvisée mais essentielle : ravitailler les troupes alliées - en vivres, mais surtout en carburant et munitions. Il faut dire que les ports de Saint-Malo et de Saint-Brieuc, tout comme ceux de Morlaix et de Roscoff étaient inutilisables, après le départ des Allemands, ou incapables d’accueillir les imposants Liberty ships américains. Les stratèges se sont donc tournés vers la Lieue de Grève, la seule plage assez plate, dans le Nord-Bretagne, pour accueillir ce qui sera le seul débarquement allié dans la région, durant la Seconde Guerre mondiale.
La zone avait déjà été en partie nettoyée par les Résistants, les jours précédents. Les derniers Allemands ayant été aperçus le 4 août, dans l’Hôtel de la Plage. Les bulldozers du Génie n’ont pas traîné pour dégager les derniers barrages routiers. Pas plus pour aménager, au niveau du Roscoat, un accès sur la plage. Il faut dire que les Occupants l’avaient truffée de défenses pour empêcher les atterrissages d’avions et les offensives maritimes. « Chevaux de frise, blocs de béton, billes de bois hérissées dans le sable et surplombés de mines barrent la Lieue de Grève sur quatre lignes de défense », explique l’historien Jean-Jacques Monnier.
Nombreux étaient les Michelois à s’aventurer sur la plage, une fois celle-ci déminée, pour aller à la rencontre des GI, durant les opérations de débarquement. (
Un ballet de camions sur la grève
Peu avant midi, ce 11 août 1944, deux LST américains, numérotés 344 et 519, et le 421 britannique s’élancent vers le haut de la plage, après avoir largué, par l’arrière, leur ancre reliée au navire par une immense chaîne. À 12 h 15, les trois navires, au faible tirant d’eau, sont échoués, en plein milieu du banc de coques. Le temps d’une marée, d’ouvrir les grandes portes de l’étrave et de descendre la rampe d’accès, le déchargement ne commence que le lendemain après-midi. Les camions chargés de jerrycans de 20 litres - surnommés les « bidons boches » - débutent leurs allers-retours sur la grève. Un ballet interrompu un moment… faute de camions disponibles pour assurer cette mission logistique. Deux jours et deux nuits sont nécessaires - marées obligent - pour vider la cargaison, sous les ordres du lieutenant US Frank Cooper.
On a frôlé la panne sèche
Ces trois LST, au moment d’appareiller, ne repartent pas les cales vides. Croisant le flot des camions de munitions, ce sont des ambulances rapatriant des blessés tout juste évacués du front qui remontent la passerelle. Profitant du coefficient de marée, faisant machine arrière toute, les pachas donnent ordre d’actionner les puissants treuils qui remontent les longues chaînes de plus de 300 m de long reliées aux ancres. Arrachés au sable breton, les LST et leur escorte mettent cap sur l’Angleterre.
81 débarquements en un mois et demi
D’autres navires s’échoueront sur la grève, durant les deux mois que dureront les opérations Author I puis Author II. Une dernière mission qui ne se passera pas sans accroc, la météo dans la Manche ralentissant la traversée de la flottille. Et c’est peu dire que le précieux chargement de ces Landing ships tank était attendu, les camions de fret ayant tout juste assez de carburant dans leurs réservoirs pour atteindre les navires échoués.
81 opérations de déchargement seront réalisées jusqu’à fin septembre, Brest étant libérée le 19 septembre. Entre-temps, les ports de Roscoff et Morlaix, remis en état, auront pris le relais. Et si les missions Author n’ont pas permis le débarquement d’un tonnage exceptionnel, elles ont été essentielles pour mener à bien la mission : libérer la Bretagne.