à cent à l'heure… Pour preuve cette nouvelle histoire racontée par son metteur en scène Bernard Schmitt dans le Journal du dimanche, qui a réalisé nombre de ses concerts et clips – il publie Johnny Hallyday, private access (Éditions Seghers) avec d'autres proches. Dans le JDD, Bernard Schmitt explique combien le Taulier aimait réaliser des clips vidéos, lui qui a toujours rêvé d'être comédien. Et dans les années 1980, il enchaîne les tournages pour soutenir ses tubes à l'écran.
« Il venait de s'acheter une Ferrari, se souvient son metteur en scène. Le soir, après la journée de tournage, il a voulu nous montrer ses talents de pilote. On tournait vers Bercy. Johnny nous embarque sur les quais à 160 km/h. » Les voilà qui arrivent vers la Concorde et s'engagent dans des rues plus étroites. « Mais prise par la pluie, la voiture dérape sur une petite place et s'encastre dans une guérite. C'était le ministère de l'Intérieur ! ».
Très excité, le rockeur prend alors vite les choses en main. « Furibard, Johnny sort de l'habitacle et exige un téléphone auprès des gardes, affolés. Il devait bien être 1 heure du matin quand Johnny a réveillé Chirac en pleine nuit. Il gueulait au bout du fil, mais son interlocuteur, très compréhensif, l'a rassuré : Bouge pas, Johnny, je m'occupe de tout. » Chirac, alors maire de Paris, appelle illico le ministre de l'Intérieur Pierre Joxe, qui envoie une dépanneuse de la police un quart d'heure plus tard pour s'occuper de la Ferrari accidentée et la ramener au garage de Neuilly, où le concessionnaire l'avait vue partir le matin même flambant neuve. « Puis, une bagnole de flics nous a ramenés chez nous, raconte Bernard Schmitt. Quand c'était Johnny, il n'y avait plus ni gauche ni droite. »
Ce n'est pas la seule fois que le rockeur sonnera son copain haut placé. Son caméraman Patrice Gaulupeau avait raconté comment il avait également appelé Chirac en pleine nuit, en 1993 pour tenter de retrouver… sa moto volée. « Voilà, j'aimerais que tu me rendes un service, lui a-t-il demandé à l'époque sans détour. On m'a volé ma moto, chez moi, à La Lorada… Comme tu es le maire de Paris, tu es le maire de tous les maires. Est-ce que tu pourrais passer un coup de fil au maire de Saint-Tropez pour qu'il me retrouve ma Harley ? »
Il faut dire qu'un vrai lien de confiance s'était établi entre les deux hommes, consolidé par leur amitié commune pour Line Renaud. Le rockeur s'engage même politiquement auprès du maire de Paris, quand ce dernier se présente à la présidentielle de 1988 : « On a tous quelque chose en nous de Jacques Chirac », lance-t-il lors d'un meeting monstre, à un mois du premier tour. Cela vaut bien quelques petits services en retour… Chirac aura toujours des attentions pour son ami, il lui enverra ainsi une lettre très personnelle quand il se fera opérer de la hanche en 2011. En retour, le chanteur n'a jamais caché sa préférence pour l'ancien président de la République. « Jacques Chirac est un homme simple et droit. Un fana de bière qui arrose son coq au vin de Corona, jugera le rockeur dans L'Express. Ce n'est pas un président pédant comme certains l'étaient. Et croyez-moi, j'en ai vu passer…. »
Dans l'intimité de Johnny Hallyday avec le photographe Tony Frank
C'est peut-être la première fois que Laeticia Hallyday se livre de la sorte dans des entretiens. Ses confidences, "très compliquées" à filmer dans un lieu symbolique et recueillies par le réalisateur William Karel, sont à retrouver dans le documentaire inédit Johnny par Laeticia, diffusé ce jeudi 8 décembre dès 21h10 sur M6. Un film d'1h30 dont aucune image n'a été modifiée à la demande de la principale intéressée, auquel ont participé à leur manière Jade et Joy Hallyday.
L'un des sujets abordés n'est autre que les problèmes financiers du Taulier, que Laeticia Hallyday découvrira après une première rencontre qui ne commençait pas très bien, suivie de critiques de l'entourage du Taulier. "Quand je l'ai connu en 1995, il avait des arriérés fiscaux terribles, il devait énormément d'argent au Fisc. Les huissiers sont arrivés, ils ont tout pris dans la maison : on n'avait plus rien ! On est parti de rien en 1995, on s'est retrouvé avec un lit et quelques chaises. Mais c'est l'histoire de sa vie, à 200 à l'heure avec beaucoup d'insouciance", se souvient-elle devant la caméra. Elle le reconnaît : son mari "vivait au-dessus de ses moyens", et principalement des avances qu'il avait eu pour des prochains albums ou concerts.
EN IMAGES - Coulisses, concerts, cinéma, studio, famille... Un riche ouvrage de Tony Frank, photographe prisé des chanteurs français, dévoile toutes les facettes de l'idole, disparu il y a cinq ans.
Depuis quelques jours, les fesses de Michel Polnareff s'affichent sur les murs de Paris, cinquante ans après leur première apparition scandaleuse. Ce cliché entré dans l'histoire est l'œuvre de Tony Frank. L'homme a par ailleurs signé la pochette de l'album français le plus admiré à l'étranger, celui de Serge Gainsbourg, Histoire de Melody Nelson. Deux exemples qui illustrent la force du travail de ce photographe qui connaît la musique. On en savait moins sur sa proximité avec Johnny Hallyday dont on célèbre en ce mois de décembre les cinq ans de la disparition.
«Ma femme était chef maquilleuse de Johnny, précise Tony Frank. Pendant trois ou quatre ans, on a entretenu des liens de famille avec lui». L'intimité du photographe avec son sujet transparaît dans chacune des photos choisies dans l'ouvrage Johnny Hallyday, les années Tony Frank. À l'heure où fleurissent les livres plus ou moins recommandables célébrant le chanteur, le travail du photographe tranche par la chaleur, la tendresse et l'émotion forgées par un compagnonnage au long cours. «Au total j'aurai passé 39 ans près de lui», s'émeut Tony Frank.
Lunettes fumées, silhouette efflanquée, sourire charmeur… À 77 ans, il porte beau. Sa vie trépidante a contribué à entretenir la flamme de cet ex-fan des sixties. De Salut les Copains à aujourd'hui, il a été le témoin privilégié d'un bouillonnement inédit. Celui des yéyés puis des grands auteurs-compositeurs Gainsbourg, Véronique Sanson et tant d'autres: «Ma première rencontre avec Johnny remonte au Golf Drouot. Pour nous, Français, c'était l'équivalent de la Cavern de Liverpool, où les Beatles ont fait leurs débuts. C'était le berceau du rock'n'roll français. Nous sommes en 1959, j'ai 14 ans avec une fausse carte d'identité pour pouvoir entrer. Je vois alors Johnny danser le twist devant le Juke-Box. Il est déjà au-dessus des autres. Tout le monde le regarde avec admiration ».
À lire aussiUne exposition immersive sur Johnny Hallyday à Bruxelles puis à Paris
Son premier cliché de Johnny est une mise en scène pour Salut les Copains. «On m'envoie à Strasbourg. Johnny qui faisait son service en Allemagne avait obtenu une permission d'une demi-journée. Il est plutôt détendu, content de sortir de sa caserne. Je le retrouve à l'hôtel pour la photo inspirée d'une image de Presley regardant la télé en pyjama dans sa chambre. Je pars acheter des draps jaunes aux nouvelles galeries, un pyjama trop grand. C'était en 1965.»
Le magazine préféré de la jeunesse consacre les idoles sur papier glacé. «On leur faisait jouer des personnages comme dans des films. Eddy Mitchell en cow-boy, Françoise Hardy en armure devant un château... Ils avaient tous l'impression de faire du cinéma et ne manquaient pas de sens de l'autodérision». Le star-system n'a pas encore imposé ses lois et restreint l'accès des photographes aux artistes. Riche de 600 images, l'ouvrage de Tony Frank illustre avec jubilation cette époque bénie. «Ils n'étaient pas débordés comme maintenant, avec 18 chaînes de télé, des sites internet et les réseaux sociaux», considère le photographe.
Un temps qui permet une vraie complicité: «Tout au long de notre relation, on parlait beaucoup de musique. Avec Johnny, on ne parlait pas de Proust, ça c'est sûr. Mais on adorait James Dean, on vivait à 100 à l'heure, on partait à Deauville sur un coup de tête manger des crevettes et boire du blanc. On en a bien profité. Si on avait su que ça ne durerait pas, on aurait mis de l'argent de côté !».
Coulisses de concerts, ambiances émouvantes en studio, situations insolites, décors exotiques, vie quotidienne... En marge des photos, le livre fourmille de scènes et d'anecdotes rapportées en quelques mots par Tony Frank. Avec émotion mais sans complaisance: «Johnny n'était pas toujours simple».
De par sa position, le photographe a été le témoin privilégié des métamorphoses de l'idole. «Ma période préférée, était celle où il chantait de la soul. Des adaptations de Wilson Pickett ou “Je veux te graver dans ma vie des Beatles”. Il débarquait à l'Olympia en big band». Dans les années 1980, Johnny adopte une allure assagie, cheveux courts, cravate fine sous l'influence de sa compagne Nathalie Baye: «Il ne buvait pas, était mince, tournait avec Godard, travaillait avec Berger et Goldman, des mecs sages beaucoup moins fêtards que lui. Il était pro et avait un grand respect pour le public». Par la suite, Johnny renouera avec une surenchère d'effets et la démesure. À ce moment-là une ribambelle de photographes lui tourne autour, chacun revendiquant l'exclusivité du sujet. «Moi je n'ai jamais rien revendiqué. Je n'ai jamais dit “Je suis le photographe de Johnny”. Je n'ai jamais été engagé ni payé par lui.»
Johnny Hallyday, les années Tony Frank, éditions EPA, 288 pages, 39,95 euros.
La rédaction vous conseille