vendredi 3 février 2023

DRAPEAU DE LA MARTINIQUE


Martinique: le drapeau de la discorde


Serge Letchimy : « Ce drapeau, cet hymne sont des actes politiques majeurs que nous léguons désormais à la postérité »

FA

Serge Letchimy a lu un discours évoquant "la fin du sentiment d'infériorité des Martiniquais".
Serge Letchimy a lu un discours évoquant "la fin du sentiment d'infériorité des Martiniquais". • 

Au bout de deux heures de débats, les élus de l'Assemblée de Martinique ont adopté en plénière, jeudi 2 février, le drapeau rouge, vert et noir " historique ". La bannière " au triangle " a recueilli une écrasante majorité des suffrages : 45 voix pour, 0 contre, et une abstention dans l'hémicycle de la Collectivité territoriale. Serge Letchimy a salué, à l'issue du vote, un " acte collectif majeur ". Voici l'intégralité de son intervention.

"Mes chers collègues, 

Par cet acte collectif majeur,

Par votre vote,

Par ce choix libre de l'assemblée de Martinique,

Nous venons de distinguer notre époque et de marquer notre Histoire ! 

Ce jeudi 2 février 2023 nous vivons un moment historique de prise de conscience, de dépassement et d'unité du peuple martiniquais. 

En vérité, ce drapeau, cet hymne, ces symboles, sont des actes politiques majeurs que nous léguons désormais à la postérité. 

Que signifie ce que nous venons de faire ? 

Nous avons rappelé des siècles d'attentats, d'injustices, de souffrances, et de crimes dont une grande partie de notre population porte encore les traces. 

Nous avons honoré des siècles de luttes et de résistances menées par nos ancêtres pour que la liberté, la dignité et le respect des droits humains ne soient pas des calebasses vides. 

Nous nous sommes inclinés au-dessus du sang qui a coulé. 

Nous avons salué les héroïsmes et le courage de nombreuses générations d'hommes et de femmes qui ont fait ce que nous sommes, et qui aujourd'hui nous remplissent d'un sentiment très fort que rien ne pourra nous enlever : nous sommes un peuple avec une histoire, une culture et une identité. 

 

 

"La continuité historique de notre peuple et de sa conscience"

Mais avec ces deux gestes symboliques nous avons ensemble et sans exclusion de quiconque, quelle que soit sa couleur de peau ou son origine, signifié au monde :

La fin d'une époque ! 

La fin du sentiment d'infériorité.

La fin de la passivité.

La fin de l'asservissement mental, moral, inculqué au plus profond de notre conscience.

La fin d'un sentiment d'impuissance qui ne mène qu'à la violence et au ressentiment stérile. 

Ces symboles sont aussi la force d'imaginer un autre monde, sans asservissement, sans domination, sans exploitation : un monde de solidarité, d'échange et de respects mutuels, dans une république unie qui respecte les différences. 

Ces symboles rappellent aussi sans ambiguïté, la continuité historique de notre peuple et de sa conscience ; affirme notre droit, et même notre devoir, d'en assurer le devenir sans nationalisme archaïque, sans esprit communautariste, sans violence, sans racisme, sans haine envers quiconque, sans exclusion de ceux qui ont fait le choix de partager le destin de Notre pays. 

Ces symboles expriment encore notre ouverture fraternelle au monde dans le respect de la nature et du vivant. 

Aux côtés des drapeaux de la République française (bleu, blanc, rouge) ; de l'Europe (des 12 étoiles de la paix) ; de l'OECO (qui nous rappelle le vert et le jaune de notre maison commune, la Caraïbe) ; de l'AEC (dont le bleu nous rappelle nos racines ancestrales amérindiennes) flottera désormais une dignité reconquise, une fraternité universelle portée dans la sérénité, et qui s'engage à respecter toutes les différences. 

 

  "Notre drapeau et notre hymne chanteront dans tous les alizés, une détermination"

Je formule le vœu que ces symboles que nous nous sommes donnés, garantissent à tous la force de bannir toutes les hiérarchies de race, de culture, ou de civilisation ; qu'ils nous assurent que la seule richesse qui vaille c'est celle d'une humanité qui se respecte et qui respecte le vivant. 

Notre drapeau et notre hymne chanteront dans tous les alizés, une détermination. Celle d'un peuple, d'un peuple exerçant pleinement sa dignité de penser, d'initier, de créer, d'inventer, de bâtir sans aucune limite à ses capacités. 

Ils chanteront, sans exactions et sans violences, notre volonté d'aborder le futur sans complexe, avec fierté, avec audace, avec l'esprit de création. 

Ils chanteront à la face du monde, de l'Europe, de la France, notre appartenance aussi à cette géographie cordiale que sont la Caraïbe et les Amériques, et notre volonté de nous y construire sans renoncer aux soli- darités que nous ont offertes nos histoires partagées, nos espérances conquises, nos combats fondateurs. 

Notre drapeau flottera au-dessus de notre cheminement vers l'émancipation, la responsabilisation et le progrès, à partir des ressources instituantes que sont notre culture, nos patrimoines et notre identité. 

 

 

Il flottera au-dessus d'une solidarité pleine, saine et féconde, entre l'Europe, la France et la Martinique ; il rappellera, à qui voudra l'oublier, que l'égalité n'est pas l'ennemi du droit à la différence ; que si l'égalité s'inscrit dans les droits universels de l'humaine condition, la différence est le signe d'une richesse construc- tive et la base de la créativité utile à l'épanouissement d'une société et à ses rapports aux autres. 

C'est dans ce sens que ce symbole est pour nous un refus de la passivité, du pathétisme inculqué, du dolorisme, de l'autoflagellation, voire de l'auto-aliénation que nous nous infligeons au quotidien.

Il est l'étendard de valeurs de dignité, de principes et de luttes où se fera notre destin. 

Une fois qu'il sera hissé au-dessus de nous, nul ne saurait plus désormais accepter que les singularités soient gommées,

que la diversité soit bafouée, 

que les capacités d'initiatives soient contrôlées

que notre force de création soit limitée,

que notre puissance écologique, géostratégique et maritime soient ignorées et que nos valeurs instituantes du respect et de la dignité soient abîmées. 

Il ne s'agit en aucune manière d'un acte d'indépendance, d'autonomie, ou d'un abandon stérile à du séparatisme. Il s'agit au contraire d'associer, de relier, de rassembler, de mettre ensemble des ferveurs nouvelles pour permettre à notre jeunesse de mieux regarder demain. 

Il s'agit de conquérir une plus large fraternité.

Il s'agit d'ouvrir une nouvelle page pour notre pays. 

Voilà le paysage que nous avons décidé aujourd'hui.

Il n'y a rien de facile là-dedans.

L'obscurantisme nous guette, la régression nous fixe.

Il nous faudra avancer pas à pas, et tenir gagné chaque pas. Il y aura sans doute des sacrifices à endurer. 

Je suis prêt à les assumer tous, car ma conviction la plus profonde est celle-ci : ce que nous avons commencé à faire aujourd'hui est notre mission la plus exacte, et c'est notre devoir le plus impératif. 

Je livre mon sacrifice à la postérité. Je vous remercie. Chers collègues, sœurs et frères martiniquais, je suis fier. Très fier de notre Martinique !"


 Le drapeau officiel à la croix-blanche et bleue, est orné de quatre serpents fer de lance, qui sert de symbole à cette île des Caraïbes depuis le XVIIe siècle.




Ce drapeau est le  témoin du passé esclavagiste de la France en Martinique (il était notamment arboré sur les navires négriers).

Cédant aux demandes du Mouvement international des réparations et du Conseil représentatif des associations noires (Cran) de France, qui avait déposé plainte contre la présence de ce symbole « raciste » au sein de la République, dans un souci d’apaisement, le président Emmanuel Macron avait consenti à faire retirer l’écusson martiniquais controversé des uniformes des gendarmes représentant l’État dans ce département d’Outre-mer. 

Pour les mouvements indépendantistes, seul le drapeau tricolore rouge (la vie et à la liberté) – vert (nature) – noir (« qui rend hommage à tous ceux qui ont été bafoués») doit être arboré en Martinique. 


Le drapeau retenu D.R.


Inventé par Victor Lessort, un militant de l’Organisation de la jeunesse anticolonialiste de la Martinique (OJAM), il a fait son apparition en 1962 et est régulièrement mis en avant lors de manifestations anti-gouvernementales ou lors de grèves. Quand il n’est pas hissé en guise de provocations sur le fronton des mairies (comme en 2019, à Fort de France) ! Le choix de ses couleurs est loin d’être anodin. Selon les indépendantistes, le drapeau trouverait son origine première dans les révoltes esclavagistes fomentées par les « neg’ marrons » contre les planteurs blancs Békés et reste une référence aux thèses panafricaines. Chantre de la négritude (un mouvement littéraire), le poète anticolonialiste Aimée Césaire avait eu droit à ce drapeau sur son cercueil en 2008, agité sans complexe par le Parti progressiste martiniquais (PPM) qu’il a fondé.


Le drapeau retenu D.R.

Le 28 juillet 2022, la CTM a ressorti son projet (l’année précédente, une tentative similaire avait été annulée par la justice administrative) et a appelé les Martiniquais à se prononcer sur le sujet et sur un nouvel hymne officiel. Exit l’actuel drapeau « colonialiste », plusieurs dérivés du fameux tricolore rouge-vert-noir ont été présentés aux habitants de l’île. Mais, encore une fois, les polémiques ont ressurgi. Notamment lorsqu’on a découvert que le vote virtuel permettait toutes les fraudes possibles. La plateforme choisie pour recueillir les votes a été vite suspendue, à peine 24 heures après sa mise en ligne, le 2 janvier 2023, afin d’être mieux sécurisée. 27 000 personnes ont participé au scrutin participatif (sur une population recensée de 360 000 personnes) et 73% d’entre-deux ont choisi le fameux drapeau indépendantiste auquel on a rajouté une silhouette de colibri noir. Mais la contestation continue. Selon les détracteurs, la créatrice du nouveau drapeau, Anaïs Delwaulle, aurait plagié un logo que l’on peut voir sur la banque d’images en ligne Shutterstock ! Cette accusation est fermement démentie par l’intéressée, qui s’en est longuement expliqué dans un droit de réponse publié dans la presse locale.



Victime de cyberharcèlement, la créatrice du drapeau au colibri se retire

Rédaction web
C'est donc ce drapeau, le n°891, qui sera soumis au vote des élus de l'Assemblée les 2 et 3 février prochains.
C'est donc ce drapeau, le n°891, qui sera soumis au vote des élus de l'Assemblée les 2 et 3 février prochains. • DR

La Collectivité Territoriale de Martinique annonce, ce lundi soir (23 janvier) prendre acte de la décision de la gagnante de la consultation populaire pour le « Drapeau de Martinique ». Dans un communiqué, Anaïs Delwaulle explique retirer sa proposition.

Anaïs Delwaulle, gagnante de la consultation populaire du vote pour le drapeau censé représenter la Martinique lors des compétitions sportives et culturelles, retire sa candidature. Elle l'annonce ce lundi dans un communiqué de presse, publié sur ses réseaux sociaux. 

Cette « Martiniquaise engagée et cheffe d'entreprise » assume son choix par « la violence de la controverse et des débats qui ont suivi le choix du drapeau au colibri ». Dans son communiqué, elle explique également être victime de cyberharcèlement et menace tous ceux qui continueront de poursuites pénales.

 

 

Peu après cette première communication, la Collectivité Territoriale de Martinique affirme à son tour « prendre acte » de ce choix, dont le président du conseil exécutif a été directement informé par des emails officiels.

 

La CTM condamne la « vague de haine »

« La CTM appelle au respect de ce choix définitif, apporte son soutien à la candidate et condamne avec force l'acharnement et la vague de haine dont elle a été victime ». Elle rappelle que le cyberharcèlement est un délit puni par la loi (jusqu'à 2 ans de prison et 30 000 euros d'amende).

 

 

« Face à cette situation et face au cri d'alerte de cette candidate, la CTM appelle au calme, au respect et surtout à l'unité ».

Elle soutient qu'un nouveau classement sera établi après ce désistement. C'est donc le drapeau n°891 (Ndlr : le drapeau RVN) qui prend désormais la première place.

Ce nouveau classement sera transmis à l'Assemblée de Martinique, qui délibérera « librement du choix final de l'hymne et du drapeau de la Martinique ».

Les élus de l'Assemblée de Martinique se prononceront les 2 et 3 février prochains « de manière définitive », soutient la CTM. 

 

 

Utilisateur-440748

 

C'est bien Anaïs. La prochaine fois, pensez à être moins naïve avant de faire plaisir et de prôner, juste pour Gagner, des idées et des couleurs derrière lesquelles sont louées les idées de Gauche et l'envie d'indépendance de la France .

1
  

realite972

 

Heureusement que nous sommes encore dans une démocratie sous l'étandard fançais.
qu'en serait il dans une Martinique indépendante avec tous ces abrutits et brulés du cerveau qui nous travestissent notre histoire à leur fin .
Martiniquais soyez vigilant ne nous laissons pas entrainer dans la dérive que des mini goupuscules veulent nous y conduire

1
  

dani972

 

Hum hum... Quand je vois les difficultés générées par le choix d'un simple drapeau "culturel" pour la Martinique, je m'interroge sur les capacités de la CTM à s'emparer de dossiers autrement plus importants pour l'avenir de la Martinique...




  La honte : pour Macron, les Haïtiens sont « complètement cons » et ont tué « Haïti » Emmanuel Macron affirme que les « Haïtiens sont compl...