mercredi 16 septembre 2020

 Covid-19 oblige, on a bien cru ne pas avoir de Tour de France en 2020. Et puis, avec deux mois de retard, et une bulle sanitaire plus tard, voilà les coureurs de la Grande Boucle embarqués pour 21 étapes et 3 484 km sur les routes de France. Petit aperçu de la journée à venir.

  • Au menu du jour, étape 16 : La Tour-du-Pin - Villard-de-Lans, 164 km

Aujourd’hui, cela va monter et descendre, monter et descendre, monter et descendre et monter pour finir… Comme ces derniers jours, direz-vous ? Effectivement, la fin de deuxième semaine de ce Tour de France a été marquée par des étapes aux profils en dents de scie plus ou moins acérées et le franchissement de sommets plus ou moins élevés. Mais en ce début de troisième semaine, on monte encore d’un cran et c’est aux Alpes que le peloton va être confronté.

Pas encore de la très très haute montagne en ce mardi 15 septembre (c’est pour mercredi). Mais 164 km en Isère, entre La Tour-du-Pin et Villard-de-Lans Côte 2000, avec au menu une succession de cinq côtes et cols dans la Chartreuse et le massif du Vercors. « Toutes les caractéristiques de l’étape piège », pour reprendre le propos de Christian Prudhomme, le directeur du Tour, qui rappelle qu’en 1987 le Français Jean-François Bernard, lâché en début de l’étape en raison d’une crevaison, avait terminé à plus de quatre minutes et cédé son maillot jaune à Stephen Roche, futur vainqueur à Paris.

  • Le vainqueur du cœur

Avec son profil, cette étape semble prédestinée aux baroudeurs-grimpeurs – ou l’inverse. Une échappée pourrait se dessiner dans le col de Porte, une fois que l’Irlandais Sam Bennett (Deceuninck-Quick Step) et le Slovaque Peter Sagan (Bora-Hansgrohe) auront réglé leurs petites affaires pour la conquête du maillot vert du classement par points lors du sprint intermédiaire, quelques kilomètres plus tôt.

On verrait bien le Français Valentin Madouas (Groupama-FDJ) retenter l’aventure. Vendredi, sur la route menant jusqu’au puy Mary, libéré de la tâche d’accompagner son leader, Thibaut Pinot, on avait déjà vu le Finistérien à la manœuvre, finissant quatrième. II avait sans doute payé sur la fin le fait d’être parti à contretemps derrière les premiers échappés du jour. « Il m’en manque encore un peu », avait-il plaidé à l’arrivée, tout en assurant : « Mais ça va venir. »

On ne peut que le lui souhaiter. Et s’il se trouve en position de jouer la gagne, d’éviter la mésaventure qu’avait connue son père, Laurent, lors du Mondial 1994 : échappé dans le final et alors qu’un podium lui était quasi assuré, il avait été victime d’un bris de la roue arrière au cours du dernier tour et d’un mauvais dépannage.

  • Le vainqueur de la raison

Avec 21 étapes pour 176 coureurs au départ, le Tour fait par définition des déçus. Surtout que certains gloutons ne s’encombrent pas avec le concept de « cumul » des victoires. Ainsi, Caleb Ewan, Wout van Aert et Tadej Pogacar ont déjà fait coup double sur cette 107e édition.

Marc Hirschi (Sunweb) pourrait très bien les imiter. Vainqueur à Sarran, le Suisse est la révélation de ce Tour ; sauf pour celles et ceux qui ont suivi le dernier BinckBank Tour par amour du vélo. Le protégé de Fabian Cancellara (son agent) présente toutes les qualités pour lever les bras à Villard-de-Lans.

Gros rouleur, descendeur habile et grimpeur efficace quand il a décidé de « faire l’étape », Hirschi incarne à 22 ans cette génération décomplexée des Pogacar et Evenepoel bien décidée à ne pas attendre son tour.

  • La leçon du jour

Un point blanc au milieu d’une marée jaune. Dimanche, Tadej Pogacar a déjoué la supériorité collective de la Jumbo-Visma pour s’imposer en haut du Grand Colombier. Depuis, la question est sur toutes les lèvres : le Slovène peut-il souffler la victoire sur ce Tour à son compatriote Primoz Roglic malgré la faiblesse de son équipe ?

Les dirigeants d’UAE Emirates ne pensaient pas leur prodige de 21 ans capable de décrocher la victoire finale dès cette année. Sinon, ils n’auraient pas emmené dans leurs bagages le sprinteur Alexander Kristoff (vainqueur de la première étape quand même) et son poisson pilote Vegard Laengen, assez peu utiles à Pogacar. Les Italiens Davide Formolo et Fabio Aru devaient l’accompagner dans les cols, mais les deux ont abandonné. Grimpeur reconnu, l’Espagnol David de la Cruz traîne, lui, sa misère depuis une chute en début de Tour.

En définitive, Pogacar compte seulement sur la dévotion d’un Jan Polanc (un autre slovène) et le métier de Marco Marcato. En comparaison de la force collective de la Jumbo-Visma, c’est un peu comme partir à la guerre avec un pistolet à eau. Pour l’instant, la formation néerlandaise assume l’intégralité du poids de la course. Mais qu’adviendrait-il si le leader d’UAE chipait le maillot jaune à Roglic dès ce mardi ?

Tadej Pogacar n’était pas né à l’époque, mais les plus de 40 ans se souviennent du scénario du Tour 89. Donné perdu pour le cyclisme quelques mois plus tôt, Greg LeMond n’avait pas seulement battu Laurent Fignon pour huit secondes, il avait réussi à s’imposer malgré la faiblesse de sa formation, ADR-Agrigel.

A l’arrivée à Paris, ils étaient trois équipiers à trinquer avec l’Américain, dont un certain Johan Museeuw, plus connu pour ses talents sur les pavés qu’en montagne. De quoi donner de l’espoir et des idées à Pogacar. S’il doit prendre le contrôle de la course, autant le faire lors du contre-la-montre de la Planche des Belles Filles, samedi. Le lendemain, les UAE devraient pouvoir le protéger sans trop trembler entre la rue de Rivoli, la place de la Concorde et les Champs-Elysées.

  • Détour du Tour

Il roule, il sprinte, il grimpe aussi… Depuis le début du Tour, on ne voit que lui, ou presque, lorsque le train jaune et noir de l’équipe Jumbo-Visma est à l’œuvre. Pour le sélectionneur de l’équipe nationale belge, Rik Verbrugghe, il n’est donc pas question de laisser refroidir Wout van Aert une fois le Tour de France fini. Il en a fait le leader, avec Greg van Avermaet, de la sélection belge pour le Mondial, qui aura lieu le 27 septembre à Imola (Italie), une semaine après la fin de la Grande Boucle. A en croire Rik Verbrugghe, le parcours « avec ses 5 000 m de dénivelé positif » s’annonce toutefois « peut-être un peu limite » pour ses deux coureurs. En ce qui concerne Wout van Aert, on ne le jurerait pas.

  • C’est dit

« Attaque de Pierre Rolland ! » Dimanche, alors que le leader de la formation B & B Hotels-Vital Concept était encore à l’avant de la course toute la journée, Thomas Voeckler, ex-coureur et désormais consultant de France Télévisions, a dit tout le mal qu’il pensait de cette expression, entrée dans le domaine courant des aficionados de la petite reine.

L’intéressé, lui, assure que le mème Internet (un phénomène viral) qui reprend cette expression « ne [le] dérange pas », mais qu’il est « un peu réducteur de ne s’arrêter qu’à ça pour [le] décrire ». « Je préfère être associé à un attaquant qu’à quelqu’un qui reste dans les roues et profite du travail des autres. Il faut attaquer pour gagner », a dit en souriant – enfin, on le présume, car il était masqué – Pierre Rolland, interrogé sur le sujet lundi. Le Français se verrait bien concrétiser une autre expression sur ce Tour : « Je me trouve des ouvertures, maintenant, faut que j’arrive à conclure. » A ce qu’il paraît, « Victoire de Pierre Rolland » sonne pas mal, aussi.

  • Le Tour de la Gaule

Parce que le Tour est plus qu’une épreuve sportive pour les Français, nous vous enverrons chaque jour une carte postale gourmande. Promis, nous aurons plus de mesure qu’Obélix et atteindrons plus vite la satiété.


mardi 15 septembre 2020

PARSIFAL vs PERCEVAL






 Le chevalier de la mythologie arthurienne Perceval, imaginé au XIIe siècle par Chrétien de Troyes, est redécouvert en France à la fin du XIXe via l’opéra de Wagner. L’occasion pour la presse hexagonale de se réapproprier le personnage, sur fond d’antigermanisme virulent.

La défaite de 1870 et la poussée revancharde qui s’ensuit jette en France un voile de suspicion sur les artistes allemands et leurs œuvres. Rien n’est plus vrai pour Wagner et ses opéras. L’Anneau du Nibelung est moqué par une très grande partie de la critique française lors de sa première représentation à Bayreuth en 1876.

On va même jusqu’à débattre de sa personne en première page du Figaro où Victor Tissot le dépeint pour un lectorat catholique conservateur comme un révolutionnaire protestant allemand :

« En 1849, il était aux premiers rangs des insurgés de Dresde, et il menaçait de tout piller et de tout brûler. Pour lui, la révolution avec ses fusillades, ses coups de canon, ses cris, ses flots de sang, était belle comme un grand opéra tragique. 

Il dut s’échapper en Suisse. De Zurich, il lança des brochures incendiaires contre les “despotes allemands.” Mais depuis lors, les Parisiens ont eu le mauvais goût de siffler son Tannhauser, et ce n’est plus l’Allemagne, c’est la France qu’il prend à partie. 

La défaite des armées françaises, le bombardement de Paris, mirent naturellement le Luther de la musique dans une jubilation sauvage. Il vit dans ces désastres le juste châtiment d’un peuple qui avait méconnu son génie et qui avait poussé le sacrilège jusqu’à siffler un de ses opéras. »

Mais les années 1890 sont plus favorables au compositeur allemand, notamment sous l’influence des milieux symbolistes qui se fascinent pour ses œuvres. Celles-ci suscitent même des peintures en France : Révélation (1894) de Gaston Bussière tirée du Ring, ou Le Chevalier aux fleurs (1894) de Georges-Antoine Rochegrosse [voir l'image d'ouverture], directement inspiré d’un passage du dernier opéra du compositeur allemand, Parsifal (1882), qui met en scène une variante de la légende du Graal.

Toutefois, malgré cette popularité posthume (Wagner est décédé en 1883) ses opéras sont, pendant longtemps, difficiles d’accès en France. En effet, le compositeur avait interdit de créer son œuvre en dehors du palais des festivals de Bayreuth, salle qu’il avait spécialement conçue à cet effet.

Cet embargo prend fin au début de l’année 1914 pour Parsifal. Très vite, les représentations se multiplient dans le monde, notamment à Paris, à la fois à l’Opéra et au théâtre des Champs-Élysées, où elles sont attendues par tous. Preuve de cet engouement, en 1914, le terme « Parsifal » est ainsi cité dans 4523 articles cette année-là (et 1866 fois en 1913).

La mode wagnérienne séduit tous les bords politiques. Le Cri du peuple, journal d’extrême gauche, consacre sa chronique théâtrale du 14 janvier à l’opéra inspiré des « légendes du Grâl » [sic], L’Humanité, de son côté, après avoir annoncé le 21 décembre 1913 que les répétitions générales étaient complètes puis salué la première le 4 janvier 1914, en vient à célébrer les héros mis en scène par Wagner comme des pacifistes avant l’heure, dans un contexte faisant suite aux débats sur la loi des Trois ans augmentant la durée du service militaire en France :

« Des chevaliers du Graal tout à fait pacifiques, qui ne portent aucune arme et qui ne veulent pas voir le sang couler. »

Les plus hauts représentants de l’État se pressent pour assister à l’opéra, et notamment le président de la République Raymond Poincaré en personne, comme le rapporte L’Écho de Paris le 5 janvier 1914.

De tous les éléments de la mise en scène de Parsifal à Paris, se sont, de très loin, les décors qui suscitent le plus de commentaires. Ceux-ci sont vus comme supérieurs à ceux de Bayreuth par nombre de critiques. Reynaldo Hahn, proche ami de Marcel Proust (qui sera lui-même fortement influencé par Wagner), après avoir écrit que « les chœurs de femmes sont d’une sonorité merveilleuse » et que « cette sonorité-là n’existe pas à Bayreuth, car les jolies voix françaises sont les plus jolies voix qui soient au monde ! », continue ainsi dans les pages du Journal du 2 janvier 1914 :

« Les décors, très différents de ceux de Bayreuth, leur sont très supérieurs – bien que celui du temple, d’une richesse splendide, me paraisse, par le fait de l’éclairage, peut-être, manquer un peu de mystère. 

Celui du premier tableau est d’une grande poésie, ainsi que celui de la campagne le jour du Vendredi saint ; les panoramas mouvants sont d’une belle couleur et d’une composition originale. »

L’Humanité, deux jours plus tard, ne dit par autrement :

« Le spectacle assurément l’emporte en Beauté sur celui de la “maison-mère” où, par exemple, le tableau des jardins de Klingsor était d’un goût déplorable. »

Le débat sur le décor de Parisfal commence en réalité bien avant la représentation de janvier 1914. Il se trouve alors en France peu de personnes pour contester la beauté de la musique wagnérienne. Aussi, l’orgueil national porte tout son poids sur la scénographie qui doit supplanter celle de Bayreuth.

« Parsifal fera-t-il son entrée à l’Opéra vêtu à la mode allemande ? » demande très sérieusement Comœdia le 24 septembre 1913 dans un long article avant de s’interroger de manière très rhétorique : « Ne vaut-il pas mieux s’inspirer de l’art et du goût français pour la composition des décors et des costumes ? »

C’est notamment le décorateur Eugène Martial Simas qui a la charge de l’arrière-plan de l’opéra. Influencés par l’Art nouveau, ses divers tableaux ravissent les journaux qui s’empressent de les montrer dans leurs pages. Comœdia leur consacre ainsi le 29 décembre 1913 un article, rappelant que ceux de Bayreuth incarnent « une certaine vulgarité de couleur assez déplaisante ».

De son côté, L’illustration du 3 janvier 1914 met en première page une image du troisième acte où l’on voit les protagonistes de l’opéra évoluer sous une coupole évoquant l’architecture romano-byzantine alors à la mode.

Preuve de l’importance de l’événement que représente la première de Parsifal en France, les maquettes des décors sont précieusement conservées et sont aujourd’hui visibles sur Gallica, notamment ceux de Simas (acte I et III), ou bien ceux d’un autre artiste, René Rochette, pour l’acte II.

Malgré la Première Guerre mondiale, Wagner reste très populaire en France dans les années 1920. Lorsque Parsifal est de nouveau joué en 1924, L’Intransigeant du 13 avril explique que cette reprise « constitue le plus grand événement théâtral de ces dix dernières années » tandis que Comœdia consacre le 16 avril un reportage à l’opéra.

Toutefois, malgré son succès, Parsifal n’est pas moins sujet à polémique. Celle-ci se concentre principalement sur l’origine de l’œuvre. Wagner s’inspire, pour créer son opéra, du texte Parzival écrit au XIIIe siècle par Wolfram von Eschenbach, qui s’appuie lui-même sur Le Conte du Graal de Chrétien de Troyes, texte inachevé composé en ancien français d’oïl dans les dernières années du XIIe siècle.

Une caractéristique que ne manque pas de souligner la presse hexagonale, et ce dès les premières représentations de l’opéra à Bayreuth, comme dans Le XIXe siècle du 6 septembre 1882.

« Parsifal est tiré des poèmes de Robert de Boron (le Petit Saint Gral, du douzième siècle), de Chrétien de Troyes (Perceval le Galois ou les Contes de Graal), poèmes traduits ou imités en allemand par Wolfram de Eschenbach.

Mais cette légende du Greal [sic], du vase sacré, se trouve dans les traditions les plus anciennes de tous les peuples argens [l’auteur a sans doute voulu écrire “aryens”, NDLA]. »

On retrouve des propos similaires en 1913, alors que se prépare la première de janvier 1914. Maurice Vaucaire, célèbre poète dramaturge, publie au même moment Le Vrai roman de Parsifal, adaptation contemporaine du texte de Chrétien de Troyes.

L’Excelsior du 24 octobre 1913 applaudie cette démarche restituant « le vrai Parsifal de la légende, non pas le paladin de l’opéra, romantique et ténébreux, mais le chevalier de conte de fées, charmant, jeune, traînant tous les cœurs après soi. [Maurice Vaucaire] lui rend sa grâce française ».

Cette volonté de franciser le mythe arthurien cache mal le fait que celui-ci a longtemps été ignoré dans l’Hexagone et qu’il est en grande partie redécouvert grâce à Wagner. L’orthographe hésitante de certains journalistes lorsqu’il s’agit d’écrire le terme Graal (« Grâl », « Greal ») et le choix de Maurice Vaucaire d’employer dans le titre de son livre le nom « Parsifal » et non le français « Perceval » montre bien que le public connaît surtout le chevalier sous son nom allemand. D’ailleurs, dans la presse, c’est surtout le premier qui est cité (et de très loin) et non le second.

Cette prédominance de la version allemande agace la presse nationaliste, anti-allemande et revancharde. Les colonnes de L’Action française sont ainsi remplies d’hommes qui, reniant le wagnérisme de leur jeunesse, rejettent en grande partie Parsifal. À l’instar de Maurice Pujo, Léon Daudet, le 30 décembre 1913, en Une du journal antisémite, explique ainsi :

« De même que la métaphysique allemande a perdu ses prises sur la jeunesse intellectuelle, tout au moins dans l’Université, de même les scénarios de Wagner ont laissé voir leur trame absurde et vaine, faite de réminiscences, d’épais bavardage et d’ennui.

C’est encore mon ancien condisciple de Louis-le-Grand, Joseph Bédier, l’admirable auteur d’un Tristan et Yseult restitué, après ce grand détour, au génie français, qui le déclarait hier à un de nos confrères :

“Son idéalisme facile et immoral – à Richard Wagner – m’exaspère. Dans ma jeunesse, le pasteur de Parsifal était un dieu ; de le considérer comme un néo-romantique germain peu clair et peu clairvoyant, j’étais un Philistin pour mes camarades. Je suis resté un Philistin. J’aime trop nos contes médiévaux pour comprendre les ouvrages wagnériens, et comprendre c’est aimer.”

Aujourd’hui, tous ceux qui réfléchissent pensent là-dessus comme Joseph Bédier. »

L’antisémitisme (le Juif est alors, pour les nationalistes français, un « agent allemand ») et la détestation des protestants qui a cours à cette époque dans la presse catholique ultra semblent être pour beaucoup dans ce rejet de Wagner.

Trente ans plus tard, c’est pour de toutes autres raisons qu’Aragon veut franciser le mythe du Graal. En pleine Occupation, comparant la Résistance aux chevaliers du roi Arthur avec des textes comme Brocéliande, il conteste le quasi-monopole du compositeur de Bayreuth sur Parsifal, comme il l’explique dans son essai « La Leçon de Ribérac ou l’Europe française » publié en juin 1941 dans les pages de la revue Fontaine éditée à Alger :

« Mais pour ajouter encore à la grandeur française, il fallait que Chrétien [de Troyes] inventât et fit vivre la figure la plus noble, la dernière de son œuvre, Perceval le Gallois, qui revint en France sous le nom de Parsifal. Oui, c’est de notre premier poète national, en qui s’unissaient les sentiments et les traditions des diverses parts ne notre patrie, qu’est née la première image de Parsifal. […]

Le Perceval de Chrétien est par plusieurs points différent du Parsifal de Richard Wagner (quand ce ne serait que pour ce qu’il aime embrasser les demoiselles). Il est chevalier errant qui protège les femmes, les faibles. Il n’est pas cette dernière expression de l’individualisme où Wagner et Nietzsche se rejoignent, et qui donne à Maurice Barrés, l’homme du Culte du Moi, l’occasion d’une de ses plus belles rêveries (“Le regard sur la prairie” dans Du Sang, de la Volupté et de la Mort).

Perceval est le porteur de vérité, le justicier. Il est l’incarnation la plus haute du Français, tel qu’on voudrait qu’il soit, tel qu’il est quand il est digne de ce nom. Le culte de la femme ici concilié avec la mission de l’homme éclaire cette mission de justice et de vérité. »

On le voit, tout en reconnaissant à demi-mot le fait que le mythe de Perceval et du Graal sont revenus en France par l’intermédiaire de Wagner, Aragon veut absolument distinguer la légende médiévale de Chrétien de Troyes et celle du compositeur allemand. Celle-ci est, pour le poète de la Résistance, l’annonciatrice du nationalisme (y compris français), alors que le Perceval « français » serait le héraut d’une démocratie sociale dont la France révolutionnaire est, pour lui, l’incarnation.

Ce débat ne durera que le temps de la guerre. Après, si le mythe du Graal inspire quelques travaux en France (comme la pièce Le Roi pêcheur Julien Gracq, publiée en 1948, qui doit beaucoup à Parsifal), ce n’est rien comparé à l’intense production d’œuvres populaires (films, bandes dessinées) autour de cette légende à laquelle on assiste aux États-Unis. C’est d’ailleurs par la culture américaine, et notamment grâce au succès de la fantasy à partir des années 1970 et 1980, que les récits arthuriens susciteront à nouveau de l’intérêt.

Comme au début du XXe siècle, c’est de l’étranger que le Graal arrive dans l’Hexagone.

William Blanc est historien, spécialiste du Moyen Âge et de ses réutilisations politiques. Il est notamment l'auteur de l’ouvrage Le Roi Arthur, un mythe contemporain, paru en 2016 aux éditions Libertalia.

Pour en savoir plus :

William Blanc, Le Roi Arthur, un mythe contemporain, Paris, Libertalia, 2020

William Blanc, « Wagner, à l’aube de la fantasy », in: Anne Besson (dir.), Fantasy, retour aux sources, BNF, 2020

Martine Kahane (dir), Nicole Wild (dir.), Wagner et la France, Paris, Herscher, 1983

Timothée Picard, « Wagner selon Proust : une dramaturgie de l’écriture sotériologique », in: Wagner, une question européenne : Contribution à une étude du wagnérisme (1860-2004), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006

Cet article fait partie de l’époque : Rép. radicale (1898-1914)

mardi 25 août 2020

PARIS LIBÉRÉ





Il y a 76 ans, Les hommes de la 4e division d'infanterie américaine, entrés dans Paris le 25 août, ont laissé à l'Armée française de la Libération le privilège de pénétrer les premiers dans la capitale, garantissant à la libération de Paris l'image d'une victoire essentiellement française.
 Ce succès constitue un symbole puissant qui contribue à garantir la place de la France parmi les forces alliées et dans le camp des vainqueurs du conflit.
Le 26 août, le général de Gaulle, le général Leclerc et leurs entourages descendent les Champs-Élysées en direction de Notre-Dame.

lundi 24 août 2020

25 AOÛT SAINT LOUIS

J'ai le souvenir de bien des 25 août fêtés  pour la saint LOUIS des hommes  de la famille

mon frère Louis Joël 

mon père Louis Joseph

Mon grand-père Louis Alexis

L'arrière grand-père Louis Moïse 


Bonne fête mes bien-aimés du Ciel 🥰😍😘

25 août 1270 : mort de Saint Louis (Tunis). 

Le roi de France, Louis IX, meurt de la dysenterie lors de la 8e croisade qui est la deuxième croisade à laquelle il participe. 

Canonisé le 11 août 1297, sa fête est le 25 août, jour anniversaire de sa mort. 

Il est l’un des saints patrons de la France et du diocèse aux armées.




Cest aussi un 25 août historique que je vous résume ci-dessous  :

25 août 1944  La Libération de Paris 



    Le vendredi 25 août 1944, à 15h 30, le général Philippe Leclerc de Hauteclocque (43 ans) reçoit à Paris, devant la gare Montparnasse, la capitulation des troupes d'occupation de la capitale.  Le document est signé par le général Dietrich von Choltitz, commandant du 84e corps d'armée. Il est aussi représenté par le colonel Henri Rol-Tanguy, chef régional des FTP-FFI (Francs-tireurs et partisans des Forces Françaises de l'Intérieur).  



De Gaulle, Leclerc et Chaban-Delmas (de dos) à la gare Montparnasse, le 25 août 1944


Une heure plus tard, le général Charles de Gaulle lui-même arrive à la gare et se voit remettre par Leclerc l'acte de capitulation.  Il se rend ensuite à l'Hôtel de Ville où il est reçu par Georges Bidault, président du Conseil national de la Résistance. Comme celui-ci lui demande de proclamer le rétablissement de la République, de Gaulle rétorque qu'elle n'a jamais cessé d'exister.  Sur le perron, devant une foule enthousiaste et joyeuse, sous un beau soleil estival, il célèbre en des termes flamboyants la Libération de Paris : «Paris martyrisé ! mais Paris libéré !...». Son discours improvisé est aussitôt retransmis à la radio.  Le soir, de Gaulle s'installe au ministère de la Guerre en qualité de chef du gouvernement provisoire de la République française et le lendemain, le chef de la France libre descend en triomphe les Champs-Élysées, suivi de Leclerc et de ses fidèles de la première heure auxquels il a recommandé de se tenir derrière lui.  Dans une joyeuse pagaille, acclamé par deux millions de Parisiens, il arrive à la Concorde. Là éclatent des coups de feu sporadiques. Puis le général gagne Notre-Dame pour un Te Deum passionné.   S'insurger ou attendre ?  La Libération de Paris a débuté le 10 août 1944 avec la grève des cheminots, tandis que les troupes allemandes commençaient de plier bagage.  Le général Pierre Koenig, chef d'état-major des Forces Françaises de l'Intérieur, souhaite qu'un soulèvement populaire précède l'arrivée des troupes alliées dans la capitale mais il est conscient des risques qu'il représente.  En effet, quelques jours plus tôt, le 1er août, les résistants de Varsovie ayant fait le même choix ont subi une répression d'une extrême violence. D'autre part, le risque existe d'un affrontement entre les gaullistes pilotés par Jacques Chaban-Delmas et les communistes sous les ordres du colonel Rol-Tanguy.  Le 19 août, des combats sporadiques éclatent un peu partout. 3.000 policiers de Paris rejoignent la Préfecture de police de l'île de la Cité, au coeur de la capitale, en tenue civile et avec leur arme de service et le drapeau tricolore est hissé au sommet de l'édifice. Mais les Alliés n'étant pas attendus dans la capitale avant le 1er septembre, les gaullistes jugent l'insurrection prématurée. Ils le font savoir à Rol-Tanguy par le biais d'une note transmise par l'intermédiaire de Jacques Chaban-Delmas (29 ans), délégué militaire national.  Au terme d'une violente discussion, les représentants du Comité national de la Résistance conviennent de négocier une trêve avec l'occupant. Dans les faits, elle ne sera appliquée que de façon sporadique puis plus du tout.   Lourd bilan  Entre le 10 août et l'entrée des troupes du général Leclerc le 25 août suivant, la Libération de la capitale aura causé la mort de 76 soldats de la 2e division blindée ainsi que de 901 résistants des FFI et de 3.200 Allemands (12.800 soldats allemands sont aussi faits prisonniers).  Parmi les drames les plus désolants, gardons en mémoire le souvenir de 35 garçons et filles qui avaient maladroitement confié à un agent double leur désir de combattre. Dans la nuit du 16 au 17 août, ils sont livrés par celui-ci à la Gestapo (police allemande) qui les fusille sans délai près de la cascade du bois de Boulogne.





Ce même 25 août 1944 : massacre de Maillé (Indre-et-Loire).





Dans la matinée, un groupe de SS pénètre dans le bourg de Maillé. À la grande surprise des habitants du village habitués à côtoyer les troupes d'occupation, les soldats commencent à entrer dans les maisons et à tirer sur toutes les personnes qu'ils croisent. Les maisons du bourg sont systématiquement incendiées.

124 personnes sont massacrées dont 48 enfants et 42 femmes.

Vers 12h30, les Allemands se retirent, laissant une pièce d'artillerie positionnée sur une colline voisine, détruire le reste de Maillé.

Oublié pendant plus de 60 ans, ce drame sort peu à peu de l'ombre depuis l'ouverture d'une Maison du Souvenir dans la commune.



Un autre 25 août historique



25 août 1915 : les allemands prennent Brest-Litovsk.



Après avoir reçu des renforts considérables des 8e, 10e et 12e armées, les troupes allemandes s'emparent de la ville. Toute la Pologne est dès lors occupée par les Empires centraux.

Les Russes sont rejetés sur la rive droite de la Vistule. Au total, certaines unités ont reculé de plus de 500 km depuis le début de la guerre.

Par la suite, le tsar Nicolas II limoge le général Nicolas Nikolaïevitch et prend le contrôle direct des armées afin d'éviter de nouvelles conséquences désastreuses pour l'Empire russe.










   

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